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Je me rappelle encore nos jeux.

Lui, il façonnait de petits morceaux de bois en svelte et gracieuse chaloupe. Un bout de ruban rose faisait la voile ; quatre brins de soie représentaient les cordages ; un manche de plume remplaçait le mât, et, en poussant des cris d’admiration, nous livrions aux flots la frêle nacelle.

Alors, la ronde commençait, et Jean nous chantait de sa voix un peu fausse :

V’la l’bon vent,
V’la l’joli vent,
V’la l’bon vent,
Ma mie m’appelle.
V’la l’bon vent,
V’la l’joli vent,
V’la l’bon vent,
Ma mie m’attend !

Pendant que nous chantions, toute penchée sous la brise qui faisait à peine bercer les fraisiers en fleurs, notre balancelle voguait bravement, et s’en allait à tire-d’aile faire naufrage sur ces jolis cailloux de quartz argenté qui nous firent si longtemps envie, mais que nous