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Le prêtre la regardait, froid :

— Prenez garde ! – dit-il. – Satan vous tente. L’amour qu’il fait miroiter à vos yeux n’est pas un amour chrétien. Alice, Alice ! vos yeux regardent vers une chimère sentimentale, une chimère coupable et païenne. Vous n’êtes plus une petite fille. Vous avez vingt ans, l’âge d’une femme. Il n’est pas bon pour une femme d’être aimée autrement qu’en Dieu…

Il saisit sur la table le livre laissé ouvert :

— Écoutez la parole sacrée : Il est écrit : La femme est liée à la loi. Qu’elle se marie à qui elle voudra, mais seulement selon le Seigneur…

Mademoiselle Dax, contrite jusqu’au fond de l’âme, cacha dans ses mains son visage.

Une longue minute s’écoula.

Alors, dans l’une des quatre tours, la cloche des heures tinta.

— Trois heures et demie, – dit l’abbé Buire. – Voulez-vous vous confesser sans plus attendre, mon enfant ? Vous n’aurez que le temps de redescendre en ville ; c’est toujours vous, n’est-ce pas, qui allez chercher Bernard à la sortie du lycée ?

Mademoiselle Dax s’agenouilla. Et soudain les pensées lourdes qui couraient en houle sous son front s’apaisèrent. Une gravité monastique, une humilité de nonne en prière, entraient en elle, et la pacifiaient, dès l’approche du sacrement. Elle parla bas, comme on parle devant l’autel :

— Bénissez-moi, mon père, parce que j’ai péché…