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patte ?… Ah ! non, non et non !… Nous sommes deux camarades qui marchons librement dans la vie, et qu’un caprice, même réciproque, n’attelle pas côte à côte comme deux bêtes de somme sous un seul joug. J’ai mon œuvre d’artiste à créer ; vous avez votre carrière de diplomate à parcourir. Nos deux tâches ne s’accordent pas. Nos chemins se sont croisés, je ne le regrette point. Mais je refuse de quitter mon ornière pour suivre la vôtre ; et, le carrefour franchi, j’ai toujours eu la volonté de vous tendre la main en vous disant adieu, sans réclamer du destin le moindre quart d’heure de grâce !

— Grand merci ! vous êtes charmante !… On ne renvoie pas plus gentiment le « camarade libre » à ses chères études !…

— Ne faites donc pas l’enfant !… J’ai raison et vous le savez. Assez discuté. Résumons plutôt la situation, sans phrases. Moi… je commence par moi : charité bien ordonnée !… Moi, dis-je, je constate, depuis quelques jours, que le climat de Monte-Carlo ne me vaut rien ; ici, près de vous, je deviens paresseuse, flâneuse, distraite. Ces pages-ci, que j’ai barbouillées à grand effort, ne valent pas l’allumette qui en fera un feu de joie. Je n’ai plus goût au travail. Ma volonté mollit. Mon talent fiche le camp ! Halte-là ! j’arrête les frais. Vous, votre ambassade vous réclame. Il n’est pas de bon ton pour un jeune et brillant secrétaire de vagabonder trop longtemps, à la Musset, en compagnie d’une George Sand quelconque. Conclusion : notre divorce s’impose. Et voilà pour nous deux. Voici maintenant