Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/14

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mademoiselle Dax parlait avec plus de mélancolie que de colère. L’abbé Buire toutefois n’en fit pas le partage ; et il se dressa, sévère :

— Alice, Alice ! Notre-Seigneur a dit à saint Pierre : « Ton frère péchant contre toi, tu lui pardonneras, je ne dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à septante fois sept fois ! »

Alice s’humilia séance tenante :

— Pardon, père, je suis toujours mauvaise. Mais c’est ma langue, vous savez ! Au fond, je l’aime bien, Bernard… quoique, sans médisance, on le gâte un peu beaucoup, et moi guère !

— Hélas ! – dit le prêtre. – Mille fois plus de gâteries ne paieraient pas ce pauvre enfant de l’injustice qui l’a fait protestant, à côté de vous catholique.

Mademoiselle Dax baissa la tête. Personne plus qu’elle ne plaignait son frère et son père de ne point servir son Dieu à elle, seul vrai Dieu.

Un silence attristé se prolongea. Puis l’abbé Buire s’avisa des politesses d’usage.

— Madame votre mère se porte bien ?… Mais, au fait, asseyez-vous donc, ma petite : vous êtes là comme un peuplier qui veut grandir !… Eh bien ! eh bien ! qu’allez-vous chercher là-bas, quand voilà deux chaises qui ne font rien ?…

Mademoiselle Dax tirait de son coin le prie-dieu de paille, et s’y asseyait en bébé, les genoux au menton.

— Laissez-moi là, père ! Vous savez qu’il n’y a que devant vous que j’ose me tenir mal. Ça m’amuse de