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laissé dans leurs théories ce qu’ils ne mettaient pas du tout dans leurs actes ; ils ont laissé très sincèrement, dans leur croyance, ce qu’ils ne mettaient pas du tout dans leur conduite. Ils ont pris part à un grand acte historique qui se faisait moitié par leurs soins, moitié en dehors de leurs prévisions et de leurs efforts, et qui était la suppression de ce qui restait de libertés dans l’ancienne constitution, l’établissement de l’égalité politique, la concentration, l’acheminement vers l’égalité réelle et l’égalité absolue dans le despotisme absolu. C’est cela même qui est la Révolution française ; c’est ce qu’elle était dans les desseins de Dieu, ou, si l’on veut, dans les suites nécessaires de l’histoire. Ils y ont collaboré par leurs actes de tout leur pouvoir. On dirait que faire Napoléon Ier est le dessein continu, quotidiennement et minutieusement poursuivi de l’immense majorité des révolutionnaires. — Seulement ils étaient « quand même » des élèves de Montesquieu. Quand ils agissaient, ils étaient des précurseurs et des préparateurs de Napoléon ; quand ils pensaient, ils restaient des disciples de Montesquieu ; et ainsi ils ont mis dans leurs déclarations quelques textes qui étaient timidement dans le sens de leurs actes et une foule de textes qui étaient dans le sens de leurs pensées ; et ils se trouvent avoir rédigé deux manifestes qui contredisent la plupart de leurs actes , qui sont approuvés aujourd’hui surtout par leurs adversaires