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reste convaincu que mes bestioles affamées ne recherchent ni larves, ni nymphes d’Anthophore.

Essayons maintenant le miel. Il faut employer évidemment du miel élaboré par la même espèce d’Anthophore que celle aux dépens de laquelle vivent les Sitaris. Mais cette abeille n’est pas fort commune dans les environs d’Avignon, et mes occupations du lycée ne me permettent pas de m’absenter pour me rendre à Carpentras, où elle est si abondante. Je perds ainsi, à la recherche de cellules approvisionnées de miel, une bonne partie du mois de mai ; je finis cependant par en trouver de fraîchement closes et appartenant à l’Anthophore voulue. J’ouvre ces cellules avec l’impatience fébrile du désir longtemps mis à l’épreuve. Tout va bien : elles sont à demi pleines d’un miel coulant, noirâtre, nauséabond, à la surface duquel flotte la larve de l’hyménoptère récemment éclose. Cette larve est enlevée, et je dépose à la surface du miel, avec mille précautions, un ou plusieurs Sitaris. Dans d’autres cellules, je laisse la larve de l’hyménoptère et j’y introduis des Sitaris, que je dépose tantôt sur le miel, tantôt sur la paroi interne de la cellule, ou simplement à son entrée. Enfin, toutes ces cellules, ainsi préparées, sont mises dans des tubes de verre, qui me permettront une observation facile, sans crainte de troubler, dans leur repas, mes convives affamés.

Mais que vais-je parler de repas ! Ce repas n’a pas lieu. Les Sitaris placés à l’entrée d’une cellule, loin de chercher à y pénétrer, l’abandonnent et s’égarent dans le tube de verre ; ceux qui ont été déposés sur la face intérieure des cellules, à proximité du miel,