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Enfin la voilà, dans tout son machiavélisme, l’astucieuse méthode du Pompile. Il y a péril de mort pour lui s’il attaque la Ségestrie dans son domicile ; l’hyménoptère en est si convaincu, qu’il se garde bien de commettre cette imprudence ; mais il sait aussi, qu’une fois délogée de sa demeure, l’Araignée est aussi craintive, aussi poltronne qu’elle était audacieuse au centre de son entonnoir. Toute sa tactique de guerre consiste donc à déloger la bête. Ce point acquis, le reste n’est plus rien.

Ainsi doit se comporter le chasseur de Tarentules. Instruit par son confrère, le Pompile apical, je le vois en esprit sournoisement errer autour du bastion de la Lycose. Celle-ci accourt du fond de son souterrain, croyant à l’approche d’un gibier ; elle remonte son tube vertical, elle étale au dehors ses pattes antérieures, prête à bondir. Mais c’est le Pompile annelé qui bondit, appréhende une patte, tire et lance la Lycose hors du trou. C’est désormais proie poltronne, qui se laissera poignarder sans songer à faire usage de ses crochets à venin. La ruse ici triomphe de la force, et cette ruse n’est pas inférieure à la mienne, lorsque, voulant m’emparer de la Tarentule, je lui fais mordre un épillet plongé dans le terrier, je l’amène doucement à l’entrée, puis d’un mouvement brusque la projette au dehors. Pour l’entomologiste comme pour le Pompile, l’essentiel est de faire quitter son château fort à l’Aranéide. La capture est après sans difficulté, tant le trouble est profond dans la bête expulsée.

Deux points inverses me frappent dans les faits que je viens d’exposer : l’astuce du Pompile et la sottise de l’Araignée. Que l’hyménoptère ait acquis peu à peu,