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les lilas ; le Verdier s’est établi dans l’épais abri des cyprès ; le Moineau, sous chaque tuile, a charrié chiffons et paille ; au sommet des platanes est venu gazouiller le Serin méridional, dont le nid douillet est grand comme la moitié d’un abricot ; le Scops s’est habitué à y faire entendre le soir sa note monotone et flûtée ; l’oiseau d’Athènes, la Chouette, est accourue y gémir, y miauler. Devant la maison est un vaste bassin alimenté par l’aqueduc qui fournit l’eau aux fontaines du village. Là, d’un kilomètre à la ronde, se rendent les Batraciens en la saison d’amour. Le Crapaud des joncs, parfois large comme une assiette, étroitement galonné de jaune sur le dos, s’y donne rendez-vous pour y prendre son bain ; quand arrive le crépuscule du soir, on voit sautiller sur les bords le Crapaud accoucheur, le mâle, portant appendue, à ses pattes postérieures, une grappe d’œufs gros comme des grains de poivre ; il vient de loin, le débonnaire père de famille, avec son précieux paquet pour le mettre à l’eau et s’en revenir après sous quelque dalle, où il fait entendre comme un tintement de clochette. Enfin, quand elles ne sont pas à coasser parmi la feuillée des arbres, les Rainettes se livrent à de gracieux plongeons. En mai, dès que vient la nuit, le bassin devient donc un orchestre assourdissant ; impossible de causer à table, impossible de dormir. Il a fallu y mettre ordre par des moyens peut-être un peu trop rigoureux. Comment faire ? Qui veut dormir et ne le peut, devient féroce.

Plus hardi, l’Hyménoptère s’est emparé de l’habitation. Sur le seuil de ma porte, dans un sol de gravas, niche le Sphex à bordures blanches ; pour entrer chez moi, je dois veiller à ne pas endommager ses terriers, à ne