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Ainsi la morsure de la Tarentule à ventre noir est redoutable pour des animaux autres que des insectes ; elle est mortelle pour le Moineau, elle est mortelle pour la Taupe. Jusqu’à quel point faut-il généraliser ? Je l’ignore, mes recherches ne s’étant pas étendues plus loin. Il me semble, néanmoins, d’après le peu que j’ai vu, que la morsure de cette Aranéide ne serait pas chez l’homme un accident négligeable. C’est tout ce que j’ai à dire à la médecine.

À l’entomologie philosophique, j’ai à dire autre chose ; j’ai à lui faire remarquer cette profonde science des tueurs rivalisant avec celle des paralyseurs. Les premiers, et je les mets au pluriel, car la Tarentule doit partager son art meurtrier avec une foule d’autres Aranéides, surtout avec celles qui chassent sans filets ; les premiers, dis-je, vivant de leur proie, frappent le gibier de mort foudroyante en les piquant dans les ganglions cervicaux ; les seconds, qui veulent des conserves fraîches pour leurs larves, abolissent les mouvements en piquant le gibier dans les autres ganglions. Les uns et les autres s’adressent à la chaîne nerveuse, mais ils choisissent le point d’après le but à atteindre. S’il faut la mort, et la mort soudaine, sans péril pour le chasseur, la nuque est atteinte ; s’il faut la simple paralysie, la nuque est respectée, et les segments suivants, tantôt un seul, tantôt trois, tantôt à peu près tous, suivant la secrète organisation de la victime, reçoivent le coup de poignard.

Les paralyseurs même, du moins quelques-uns, connaissent la haute importance vitale des ganglions cérébraux. Nous avons vu l’Ammophile hérissée mâchonner le cerveau de la chenille ; le Sphex langue-