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de Bordeaux, M. le professeur Pérez, à qui je soumets la dénomination de mes trouvailles, me demandait si j’avais des moyens spéciaux de chasse pour lui envoyer ainsi tant de raretés, de nouveautés même. Je suis chasseur très peu expert, encore moins zélé, car l’insecte m’intéresse beaucoup plus livré à son œuvre que transpercé d’une épingle au fond d’une boîte. Tous mes secrets de chasse se réduisent à ma pépinière touffue de chardons et de centaurées.

Par un hasard des plus heureux, à cette populeuse famille d’amasseurs de miel se trouvait associée la tribu des chasseurs. Les maçons avaient distribué çà et là, dans l’harmas, de grands tas de sable et des amas de pierres, en vue de la construction des murs d’enceinte. Les travaux traînant en longueur, ces matériaux furent occupés dès la première année. Les Chalicodomes avaient choisi les interstices des pierres comme dortoir pour y passer la nuit, en groupes serrés. Le robuste Lézard ocellé, qui, traqué de trop près, court sus, gueule béante, tant à l’homme qu’au chien, s’y était choisi un antre pour guetter le scarabée passant ; le Motteux Oreillard, costumé en dominicain, robe blanche et ailes noires, perché sur la pierre la plus élevée, y chantait sa courte et rustique chansonnette. Dans le tas, quelque part, devait être le nid, avec ses œufs bleus, couleur de ciel. Avec les amas de pierres, le petit dominicain a disparu. Je le regrette : c’eût été un charmant voisin. Je ne regrette pas du tout le Lézard ocellé.

Le sable donnait asile à une autre population. Les Bembex y balayaient le seuil de leurs terriers en lançant en arrière une parabole poudreuse ; le Sphex