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J’ai voulu suivre à loisir, avec les commodités d’observation du chez soi, les progrès de cet œuf pendulaire. Pour l’œuf de l’Eumène d’Amédée, c’est presque impraticable, à cause de la cellule non transportable avec le bloc qui lui sert le plus souvent de base. Pareil domicile exige l’observation sur les lieux mêmes. La demeure de l’Odynère n’a pas le même inconvénient. Une cellule étant mise à jour et se trouvant dans l’état que je désire, je cerne le logis avec la pointe du couteau, de manière à détacher un cylindre de terre où cette cellule est comprise, mais réduite à un demi-canal pour ne rien cacher de ce qui doit s’y passer. Les provisions sont extraites pièce par pièce avec tous les ménagements, et transvasées à part dans un tube de verre. J’éviterai ainsi les accidents que la foule grouillante des vers pourrait occasionner pendant les inévitables secousses du trajet. L’œuf reste seul, se balançant dans l’enceinte vide. Un fort tube reçoit le cylindre de terre, que je cale avec des coussinets de coton. Le butin est mis dans une boîte de fer-blanc, que je porte à la main et dans la position convenable pour que l’œuf garde la verticale sans heurter les parois.

Jamais je n’avais opéré de déménagement qui nécessitât pareilles délicatesses. Un faux mouvement pouvait faire rompre le fil suspenseur, si délicat qu’il fallait la loupe pour le distinguer ; des oscillations d’ampleur trop grande pouvaient meurtrir l’œuf contre les parois de la cellule ; il fallait se garder d’en faire une sorte de battant de clochette heurtant son enceinte de bronze. Je cheminais donc avec une raideur automatique, tout d’une pièce, à pas méthodiquement combinés. Quelle mauvaise rencontre s’il était survenu quelque connais-