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LES ANIMAUX UTILES À L’AGRICULTURE

préjugés de l’imagination populaire, qui s’est complu de tout temps à faire au misérable batracien une réputation détestable.

Le crapaud est inoffensif, mais ce n’est pas assez pour le recommander à notre attention. C’est encore un auxiliaire de grand mérite, un glouton avaleur de cloportes, de limaces, de scarabées, de larves et de toute vermine. Discrètement retiré le jour sous la fraîcheur d’une pierre, dans quelque trou obscur, il quitte sa retraite à la tombée de la nuit pour s’en aller faire sa ronde en se traînant, cahin-caha, sur son gros ventre. Voici une limace qui se hâte vers les laitues, voici une courtilière qui bruit sur le seuil de son terrier, voici un hanneton qui met ses œufs en terre. Le crapaud vient tout doucement, il ouvre sa gueule semblable à l’entrée d’un four, et en trois bouchées les engloutit tous les trois avec un claquement de gosier, signe de satisfaction. Ah ! que c’est bon, que c’est donc bon ! À d’autres, s’il y en a !

La ronde continue. Quand elle est finie, au petit jour, je vous laisse à penser ce que doit contenir en vermine de toute sorte le spacieux ventre du glouton. Et l’on détruit la précieuse bête, on la tue à coups de pierres sous prétexte de laideur ! Enfants, vous ne commettrez jamais pareille cruauté, sottement nuisible ; vous ne lapiderez pas le crapaud, car vous priveriez les champs d’un vigilant gardien. Laissez-le faire en paix son métier ; il détruira tant d’insectes et de vers, que vous finirez par le trouver moins laid.

Le crapaud est d’une utilité si bien reconnue qu’en Angleterre on en fait commerce. On l’achète au marché, tant par tête ; on l’emporte chez soi avec précaution pour ne pas lui faire du mal ; on lui donne la liberté dans le jardin, ou bien on l’installe dans une serre, palais de cristal où fleurissent les plus merveilleuses plantes. Sa charge est de veiller sur les cloportes, les limaces et autres destructeurs qui pourraient porter la dent sur les précieux végétaux. Il s’en acquitte avec un zèle scrupuleux. Quel changement de fortune pour le maudit lorsque, au sein d’une tiède atmosphère embaumée de suaves senteurs, il vit parmi les fleurs les plus somptueuses, réunies à grands frais de toutes les parties du monde ! Pour achever la réhabilitation du misérable, avec les honneurs de la serre fleurie lui sont venus les honneurs de la poésie, cette fleur de la pensée humaine. Écoutez ce récit. — Un crapaud, la tête