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À ses côtés marchait, calme, une armée entière
De disciples fervents : cinq cents religieux !
Quand la vieille aperçut le Saint prestigieux,
Dans sa majesté douce et puissante et sereine,
Le trouble si profond dont son âme était pleine
Se dissipa soudain son ahurissement
Disparut aussitôt mystérieusement ;
Une paix bienfaisante envahit tout son être :
Elle vint au-devant du grand Sage, du Maître,
Et, simple et confiante, adora le Bouddha.
— Que fais-tu donc ici, la vieille demanda
Le vénérable Saint. — Je n’avais, dit l’aïeule,
Qu’un fils ; je l’aimais tant ; il est mort ; je suis seule ;
Ne pouvant supporter un éternel adieu,
Je voudrais bien mourir à mon tour en ce lieu.
— Voudrais-tu que ton fils mort revint à la vie ? —
— Rien n’est pour moi l’objet d’une plus grande envie —
Lui répliqua la vieille. — Eh bien, va, cherche un peu
Et trouve des parfums, puis, donne-moi du feu :
Les invocations dont je connais l’usage
Je les prononcerai, lui répondit le Sage,
Et ton fils revivra mais ce feu-là, vois-tu,
N’aura toute sa force et toute sa vertu
Que s’il vient d’un foyer, centre de pure joie,
Où la mort n’aurait point fait encore une proie. —