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Elle est douce au vallon où joua notre enfance
Et dont l’esprit toujours reprend l’étroit chemin ;
Douce ou l’on nous connaît, où l’on nous tend la main,
Douce où dorment nos morts, douce où l’on a d’avance
Marqué la place où l’on ira dormir demain !…

Mais plus belle et plus douce à notre âme meurtrie
Est la terre d’Alsace arrachée à nos flancs,
La terre où sont tombés nos cuirassiers sanglants,
Et d’où leur ombre encore éperdument nous crie :
« Frères, comme à venir vers nous vous êtes lents ! »

La terre qu’il faudra reprendre par l’épée,
Quitte à donner nos fils la les plus forts, les plus beaux,
― Mères, vous le savez ! ― en pâture aux corbeaux,
Mais qui, plus belle encor de notre sang trempée,
Verra se soulever les morts de leurs tombeaux

Pour regarder venir, au sommet des collines,
Nos drapeaux bien-aimés qui claqueront au vent,
Pour ouïr nos clairons sonner en les suivant,
Tandis que sous le ciel, en notes cristallines,
Ses clochers chanteront dans le soleil levant !…