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— Bats ça, si tu peux ! — m’écriais-je.

Les camarades essayaient… et ne faisaient pas mieux.

Je me perfectionnai, grâce aux cahiers de Tommy, devenu grand garçon et bon écolier. Ces cahiers, gloire de la famille, on les montrait aux amis, aux parents ; puis, lorsqu’ils avaient reçu leur juste tribut d’éloges, on les empilait dans une armoire. La clef y restait. Laissé seul au logis, parfois des heures entières, je courais aux cahiers ; j’en copiais le texte entre les lignes, risquant, si on découvrait l’attentat, une terrible fouettée… mais souffrir pour savoir, quel honneur !

Ce n’est pas tout. La nuit, dans mon réduit près du grenier — un coin rarement visité des maîtres — j’avais dressé un baril vide, mis une chaise auprès, et sur cette table improvisée j’écrivais, j’étudiais, je copiais mes feuillets de Bible ou quelque livre d’hymne.

Mes professeurs, on le voit, c’étaient tantôt les soliveaux du chantier, tantôt les murs de la ville, tantôt les cahiers du fils de la maison, tantôt mes chers volumes.

Oncle Lawson soutenait ma foi ; je le voyais souvent.

Malgré ses menaces, maître Hugues ne m’avait pas encore battu.