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que sa poussière. Délivrés des maîtres, ils étaient esclaves du froid, du chaud, de la faim. Abandonnés aux hasards de la misère ; aux mépris des blancs, qui ne leur pardonnaient pas d’être noirs ; à la vengeance des planteurs, qui les haïssaient pour être libres, pour avoir rencontré leurs balles sur les champs de bataille, pour oser requérir salaire contre labeur ; que devenir ?

Même question, posée sur tous les degrés de l’échelle.

Avec l’esclavage, les associations anti-esclavagistes s’étaient dissoutes. Il s’agissait maintenant d’action personnelle. L’heure sonnait en effet, où chaque homme devait : se faire soi-même.

Mais l’homme n’est homme, que s’il est citoyen. Il n’est citoyen que s’il vote.

Sans la boîte aux élections, la boîte au jury, la boîte aux cartouches, point de citoyen, partant point d’homme.

Le droit électoral, étant la main qui saisit le droit civil, il fallait le droit électoral aux hommes de ma race. C’est à le leur conquérir, que je consacrai mes forces, ma parole et mon temps.


— Le noir, esclave hier, voter aujourd’hui ! — On levait les bras au ciel.

Garrison lui-même s’étonnait de l’audace. Bientôt il y vint, n’étant pas d’humeur à rester en arrière, quand la justice et la vérité marchaient en avant.

On nous opposait deux objections formidables.

Voici la première : Donner aux noirs, droit de suffrage, c’est fomenter la haine entre maîtres et affranchis.