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tenant ? que je lui dis : Viens en Canada ! — Non ! qu’il me fit : Je retourne vers le vieux homme.

Chef et compagnons, rencontrèrent même sort.


Le Canada, bien que territoire anglais, n’était pas sûr pour moi.

Quatorze ans auparavant, l’Angleterre m’avait abrité contre les traqueurs d’esclaves ; j’y cherchai refuge contre les justiciers Virginiens.

L’exil pouvait se prolonger durant ma vie entière. Gouvernement, moyens d’action, tout était aux mains de l’esclavage. Qui eût dit que quatre années plus tard, l’esclavage aurait fini d’exister !

Ce fut donc le cœur oppressé, congelé jusqu’à la moelle des os, qu’à travers le North Passage, secoué par les fureurs de l’Atlantique, en péril de mort souvent, je mis le pied sur sol anglais.

— S’il m’était donné de rattraper le bâtiment qui l’emporte ! — s’était écrié le gouverneur Wise : — Je l’en arracherais à tout prix.

Mais ni les menaces de Wise, ni les griffes de Buchanan[1], ni les prisons de Virginie, ne me pouvaient plus rien.


Après six mois consacrés à donner des conférences, un événement infiniment douloureux, la mort de ma fille bien-aimée, Annie, lumière et joie du foyer, me rappela subitement en Amérique.

  1. Alors président des États-Unis.