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avait connu Brown, allait se voir soupçonné, dénoncé, poursuivi, livré aux tendres compassions du Sud.

La nouvelle de l’envahissement de Harper-Ferry, était tombée comme une bombe dans National Hall (Philadelphie) au moment où j’y donnais une conférence. Quelques heures plus tard, nous apprenions la capture de Brown, et que sa valise, contenant des lettres de Gerritt Smith, Gildings, Howe, Sanborn et moi-même, était aux mains du gouverneur Wise. Un télégramme suivait, portant ordre de nous arrêter.

M. J. Horn, le télégraphiste, accourut, m’avertit, et me pressa de quitter instantanément Philadelphie.

Mes amis frémissaient à la pensée des dangers que j’allais affronter, en passant de Walnutt Street au débarcadère.

— Venez avec moi, quelques-uns ! demandai-je : Ne fût-ce que pour voir ce qui adviendra !

Mais, sous un prétexte ou sous l’autre, les uns et les autres déclinèrent la proposition. Mon fidèle Franklin Turner, marcha seul à mes côtés, ne me laissant que sur le steamer, au moment où l’ordre : — Ce qui ne part pas, à terre ! l’obligea de me quitter.

Arrivé tard à New-York, j’y demeurai la nuit — une nuit angoissée, j’en conviens — sous le toit de mistress Marsh. Les journaux du matin annonçaient que le gouvernement n’épargnerait ni argent, ni peine, pour traquer, dépister et châtier, tout complice de Brown.

À l’instant, un souvenir me revint : Mon pupitre (Rochester) renfermait des lettres de Brown ; plus, son projet de constitution !