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Outre l’école du dimanche, je leur consacrais, l’hiver, trois veillées par semaine.

Disons-le pour être juste ; M. Freeland, qui ne faisait pas, tant s’en faut, profession de christianisme, fut de tous mes maîtres le meilleur. Il le fut, jusqu’au moment où, libre, je devins mon propre maître : assumant seul les responsabilités de ma conduite ; exerçant, sous le seul contrôle de ma conscience, le pouvoir de ma volonté.

Mon bonheur comparatif — absence de misère serait mieux dit — je le dus alors à l’ardente affection de mes frères esclaves : loyaux, fidèles, courageux.

Oui, courageux ! Oui, loyaux ! — L’accusation de traîtrise, celle de lâcheté, est volontiers jetée à la face de l’esclave. Eh bien, je le déclare ici, jamais hommes autant que ces hommes-là, ne commandèrent mon respect, ne justifièrent ma foi. Vrais comme l’or, solides comme le fer, sans petitesses, sans jalousies, indissolublement unis !

En face de cette république, les maîtres n’avaient qu’à se bien tenir.