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LE LABOUREUR.

Il fallait donc que les portes leur fussent depuis longtemps ouvertes. Entrez dans les demeures. Acceptez les dons hospitaliers en retour des bonnes nouvelles, tels du moins qu’en contient ma demeure. Serviteurs, portez dans la maison les bagages de ceux-ci. Et vous qui venez, étant chers à un homme qui m’est cher, ne me refusez rien. En effet, bien que je sois pauvre, je ne vous montrerai point un cœur mauvais.




ORESTÈS.

Par les Dieux ! dis-moi, est-ce là cet homme qui ne s’est point uni à toi, ne voulant pas offenser Orestès ?

ÈLEKTRA.

C’est lui qu’on nomme le mari de la malheureuse Èlektra.

ORESTÈS.

Ah ! il n’est pas d’indice certain de la vertu d’un homme. La nature des mortels est pleine de confusion. Déjà j’ai vu le fils d’un homme bien né n’être qu’un homme de rien, et des enfants excellents naître de pervers. J’ai vu la misère dans l’esprit de l’homme riche, et un grand cœur dans le corps du pauvre. Comment donc discerner et bien juger ces choses ? Est-ce par la richesse ? Ce serait se servir d’un mauvais juge. Par ceux qui ne possèdent rien ? Mais la pauvreté a un défaut : elle enseigne le mal à l’homme qui manque de tout. Me tournerai-je du côté