Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, II, 1884.djvu/558

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Athènaiens t’honorera par des sacrifices, et t’élèvera des monuments de pierre. Et ce sera pour les citoyens une belle couronne, parmi les Hellènes, d’honorer ainsi un homme illustre. Et moi, je te prouverai ma gratitude pour m’avoir sauvé, car maintenant tu manques d’amis. Quand les Dieux sont propices, on n’a pas besoin d’amis, car l’aide d’un Dieu suffit, quand il veut nous aider.

HÈRAKLÈS.

Hélas ! tout cela est peu de chose dans mon malheur ! Je ne pense pas que les Dieux forment des unions illégitimes, ni qu’ils enchaînent leurs pères, ni que l’un d’eux soit devenu le maître d’un autre. Je ne l’ai jamais pensé, et je ne le croirai jamais. Un Dieu n’a besoin de personne, s’il est véritablement un Dieu. Ce ne sont là que de misérables récits d’Aoides. Mais, bien que je sois accablé de maux, je crains d’être accusé de lâcheté, si je renonce à la lumière ; car l’homme mortel qui ne sait pas lutter contre le malheur, comme il lui sied, ne pourrait pas soutenir les coups d’un ennemi. J’attendrai donc courageusement la mort. Mais j’irai dans ta Ville ; et j’ai une gratitude infinie pour tes dons. J’ai supporté d’innombrables travaux auxquels je ne me suis point refusé, et je n’ai jamais versé des flots de larmes, et je ne pensais pas que je dusse en verser jamais. Et, maintenant, il faut, paraît-il, que je sois esclave de la fortune. Ô vieillard ! tu vois mon exil ; tu vois aussi en moi le meurtrier de mes enfants ! Mets-les au tombeau, et honore-les de tes larmes, car la loi ne me le permet pas. Dépose-les sur le sein de leur mère, et remets dans ses bras ces fruits d’une triste union que j’ai brisée malgré moi, malheureux ! Et, après que tu les auras enfermés morts dans la terre,