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IÔN.

Oh ! que cela m’est doux, si cela est vrai !

KRÉOUSA.

Vierge et mère, je t’enveloppai de ces langes, œuvre de ma navette. Je ne t’ai pas approché de mes mamelles, je ne t’ai point offert le lait maternel ni ne t’ai lavé de mes mains, mais, dans l’antre désert, pour être en pâture aux oiseaux carnassiers, tu fus livré à la mort !

IÔN.

Ô mère, que ce que tu as osé est cruel !

KRÉOUSA.

Saisie de crainte, j’ai perdu ton âme, fils ! Je t’ai tué malgré moi.

IÔN.

Et de moi aussi tu devais recevoir une mort impie !

KRÉOUSA.

Hélas ! nos misères passées et nos misères présentes sont égales. Nous roulons tour à tour de maux en félicités, et les vents sont changeants. Que celui-ci dure ! Nos premiers malheurs suffisent. Maintenant, ô fils, un vent favorable s’est levé après les vents contraires.

LE CHŒUR.

Aucun homme ne doit penser à désespérer, après ce qui vient d’arriver.