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LES BAKKHANTES

même l’airain ; et elles emportaient du feu dans leurs chevelures, et ce feu ne les brûlait pas. Les pasteurs, dépouillés par les Bakkhantes, se sont jetés sur leurs armes ; mais, ô Roi, ce fut un spectacle prodigieux : les traits armés de pointes ne les blessaient point, et leurs thyrses qu’elles lançaient faisaient des blessures, et, non sans l’aide d’un Dieu, contraignaient les hommes de fuir comme des femmes. Et, revenant au lieu d’où elles étaient parties, elles regagnèrent ces mêmes sources qu’un Dieu avait fait jaillir pour elles ; et elles y lavèrent leur sang ; et des serpents léchaient de la langue les gouttes qui coulaient de leurs joues. Ce Dieu, quel qu’il soit, ô Maître, reçois-le donc dans cette Ville, puisque, puissant qu’il est en beaucoup d’autres choses, on dit, comme je l’ai appris, qu’il a donné aux mortels la vigne consolatrice des peines. Sans le vin, il n’y plus de Kypris, et aucune volupté ne reste plus aux hommes.

Le Chœur.

Je crains, certes, de parler librement devant le Tyran, mais, cependant, il faut le dire : Dionysos n’est au dessous d’aucun des Dieux.

Pentheus.

Voici que, semblable au feu, la démence des Bakkhantes envahit tout, à la honte des Hellènes. Mais il ne faut pas, attendre plus longtemps. Cours à la porte Élektra, ordonne aux porte-boucliers, à tous les monteurs de chevaux aux pieds rapides, à tous ceux qui lancent des piques et qui tendent les nerfs des arcs, de se joindre à moi pour que nous portions la guerre aux Bakkhantes. Ce serait passer