Page:Eugène Le Roy - Mademoiselle de la Ralphie, 1921.djvu/255

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

longtemps et qui lui était nécessaire. Parfois, une vache, menée au taureau banal, de la Borie haute, bramait furieusement, et ces appels répétés la réveillaient soudain de sa torpeur. Des bouffées de feu lui montaient au visage ; elle se levait vivement, faisait seller « Kébir » et s’en allait au hasard, galopant sur les chemins infréquentés, comme pour fuir, loin de Guersac, les images et les pensées voluptueuses qui l’assaillaient.

Un jour, comme elle traversait une lande, sous les pieds de son cheval un lièvre déboula qu’elle poursuivit vivement : cela lui donna l’idée de chasser.

M. Boyssier fut chargé de faire le nécessaire pour satisfaire à la loi ; mais la question du permis de chasse féminin souleva des difficultés et des discussions interminables à Fontagnac. Selon la plupart, et notamment dans l’opinion d’Anatole Decoureau, devenu maire, les femmes n’avaient pas droit au permis. L’avocat sans causes s’appuyait sur les termes de la loi, qui, en parlant des personnes aptes au permis, s’exprimait au masculin.

Mais les partisans des droits de la femme, rares à cette époque, rétorquaient cet argument orthographique en disant qu’à ce compte on n’aurait jamais : guillotiné de femmes, puisque l’article 12 du Code pénal parle aussi au masculin. Ils ajoutaient que les femmes n’étant pas comprises dans les catégories d’inhabiles énumérés aux articles 6, 7 et 8 de la loi, on ne pouvait refuser un permis à une femme majeure, célibataire et inscrite au rôle des contributions.

Au Cercle, le receveur de la Régie, chaud partisan de l’émancipation des femmes, ou plutôt des femmes émancipées, soutint fort et ferme cette opinion, et, dans le feu de la discussion, échangea quelques mots aigres-doux avec M. le maire. Mais si le receveur