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Le brigadier Frédéric.

— Non ; depuis avant-hier l’école est fermée, » fit-il tristement.

Et dans la salle basse de la vieille baraque, près du petit fourneau de fonte, où les pommes de terre cuisaient dans la marmite, répandant leur vapeur au plafond, j’aperçus Margrédel assise sur un escabeau.

Elle avait sa figure de brave femme et même son sourire ordinaire.

« Ah ! fit-elle, on n’a plus la belle chambre d’en haut pour les amis… Les Allemands nous chassent de partout… on ne saura bientôt plus où se mettre !… C’est égal, asseyez-vous toujours là, sur le banc, père Frédéric, et, si le cœur vous en dit, nous mangerons des pommes de terre ensemble. »

Sa bonne humeur dans un endroit si misérable et son courage m’indignaient encore plus contre ceux qui nous précipitaient tous dans le malheur ; la consternation m’empêchait de parler.

« Marie-Rose et la grand’mère se portent bien ? me demanda Margrédel.

— Oui, Dieu merci, lui répondis-je ; mais nous sommes toujours inquiets pour Jean. Les