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Le brigadier Frédéric.

cela le peinait, et même, si j’ose le dire, l’indignait. Il en avait les larmes aux yeux comme moi.

Mais après cela, il disait que Paris tenait bien, que ce grand peuple de Paris n’avait jamais tant montré son courage et son amour de la patrie ; il ajoutait qu’une grande et solide armée, quoique jeune, s’était déjà formée du côté d’Orléans, et qu’on attendait beaucoup d’elle ; que la République avait été proclamée après Sedan, comme les paysans vont chercher le médecin, quand le malade est à l’agonie, et que pourtant cette République avait eu le courage de prendre le fardeau de tous les dangers dont elle n’était pas cause, pendant que ceux qui nous avaient jetés dans la guerre, se retiraient à l’étranger. Qu’un homme très-énergique, Gambetta, membre du gouvernement provisoire, se trouvait à la tête de ce grand mouvement ; qu’il appelait à lui tous les Français en état de porter les armes, sans distinction d’opinions, et que si la campagne se prolongeait quelques mois, les Allemands ne pourraient y tenir ; que tous les chefs de famille étant enrégimentés, leurs terres, leurs usines, leurs exploitations restaient abandonnées ;