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Le brigadier Frédéric.

« D’anciens fonctionnaires comme vous, respectés et honorés dans le pays, à cause de la loyauté de leurs services, exercent toujours une grande influence sur les paysans. Vous exprimerez hautement votre attachement à notre glorieux roi Guillaume, cet attachement de cœur que tout homme allemand éprouve. Oui, vous allez prêter serment à Sa Majesté ; et quant au reste, quant aux augmentations, je vous donne ma parole d’Oberfœrster, que tout s’accomplira selon la promesse que je viens de vous faire. »

Pendant qu’il parlait ainsi, il ne cessait de nous observer ; derrière nous se trouvaient deux ou trois grands Allemands en uniforme, qui paraissaient émerveillés et même attendris de son discours. Mais nous autres, nous restions froids, la casquette à la main ; et, comme j’étais chargé de répondre, tous me regardaient, pour découvrir ce que je pensais.

Tu conçois, Georges, quelle devait être mon indignation intérieure, de voir qu’on nous appelait honnêtes gens, bons serviteurs, pour faire de nous des traîtres. Je sentais la rougeur me couvrir les joues ; j’aurais souhaité de pouvoir