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les sèche généralement par des procédés qui diffèrent fort peu les uns des autres.

En Espagne, où les cheminées sont encore en cône évasé suspendu au milieu de la chambre d’habitation, on fait sécher les châtaignes sur des claies qui se placent alors dans ce cône, les unes au-dessus des autres, ainsi que j’ai été à portée de le voir ; mais en France on construit, dans le voisinage de la maison, un bâtiment isolé & en pierre, uniquement pour cet objet, bâtiment qu’on appelle séchoir.

Un séchoir a ordinairement deux toises & demie en carré, & trois toises de hauteur. Il est couvert avec des planches percées de quelques trous, & simplement appliquées les unes contre les autres. Il y a deux portes opposées, l’une en bas & l’autre à six ou sept pieds du sol, & quatre fenêtres, une sur chaque face, au-dessous du toit. A la hauteur de la porte supérieure, se place, sur des poutrelles, une claie, ou faite avec des baguettes entrelacées, ou avec des baguettes clouées sur less poutrelles, & un peu bombées au centre. C’est sur cette claie que se posent les châtaignes. On fait du feu sur le sol, au centre du bâtiment, avec des branches de toutes sortes d’arbres & les hérissons des châtaignes, en l’empêchant de flamber. Les châtaignes suent d’abord, c’est-à-dire, que leur eau de végétation en sort & se fixe en partie sur leur surface. Lorsque cette eau est dissipée, on éteint le feu, on les laisse refroidir, & ensuite on les jette sur un des côtés pour en mettre de nouvelles à leur place, & ainsi de même jusqu’à ce qu’il y en ait une épaisseur d’environ un pied. Alors on égalise cette épaisseur & on fait dessous un feu doux, qu’on augmente par degrés, pendant deux ou trois jours. On retourne les châtaignes & on recommence jusqu’à ce qu’elles soient complètement sèches, ce qu’on reconnoît à la facilité d’enlever & leur écorce & leur pellicule intérieure. Quelquefois, par défaut de précaution, ces châtaignes se charbonnent en partie, même le feu y prend & les consume. On doit donc veiller le séchoir jour & nuit, & balayer souvent la suie qui s’attache sur la partie inférieure de la claie.

Le procédé des Espagnols, où quatre à cinq claies sont superposées, & où les châtaignes qui ont sué sont remontées d’un étage, & ainsi de suite, en augmentant d’autant plus leur épaisseur qu’elles sont plus près de leur dessiccation complète, me paroît bien préférable.

Aussitôt que les châtaignes sont suffisamment desséchées, on les met dans un sac de grosse toile qu’on place sur un banc épais, & on les frappe avec un gros bâton. L’écorce & la pellicule se brisent par cette opération, & on sépare leurs débris, des châtaignes, en les vannant.

Ainsi desséchées, les châtaignes sont presque blanches & peuvent se garder d’une année à l’autre, si elles sont déposées dans un lieu sec, à l’abri des rats.

Mais il faut dire enfin comment on prépare, pour les manger, les châtaignes fraîches, & elles restent telles, quand on a pris ses précautions indiquées plus haut, jusqu’au mois d’avril de l’année suivante.

Les deux moyens les plus simples de manger les châtaignes, sont, ou de les faire cuire à grande ou à petite eau dans des chaudières, ou de les faire griller sous la cendre ou dans des poêles percées de trous.

On appelle cuire à grande eau, recouvrir les châtaignes d’eau, y mettre du sel & les faire bouillir pendant une heure à grand feu. C’est le moyen le plus employé dans les pays à châtaignes, où une chaudière est jour & nuit sur le feu, afin qu’on puisse y trouver de quoi se nourrir lorsque le besoin s’en fait sentir.

On appelle cuire à petite eau, ne mettre qu’une petite quantité d’eau au fond de la chaudière, de manière que les châtaignes sont cuites par la vapeur de cette eau. Par ce procédé, qui demande beaucoup plus de surveillance, & qu’on peut plus difficilement exécuter en grand, les châtaignes sont plus savoureuses, mais elles ne sont point salées. On ne le pratique guère que chez les riches.

L’épluchage des châtaignes cuites de ces deux manières est fort long, ainsi que je l’ai observé, attendu que non-seulement jl faut enlever leur écorce, mais encore, ce qui est plus difficile, la pellicule, qui est une membrane mince & très-âcre, qui la recouvre immédiatement. Cette circonstance fait qu’on se contente souvent de manger la partie qui s’extravase lorsqu’on les presse sous la dent ; mais comme il y a alors une grande perte de nourriture, les habitans des pays à châtaignes ont imaginé un procédé qui économise cette perte, ainsi que l’emploi de leur temps, procédé que je décrirai dans un instant.

La cuisson des châtaignes sous la cendre ou dans des poêles percées de trous, change la saveur des châraignes, les rend plus agréables ; mais comme elle peut difficilement s’exécuter sans que quelque partie de leur surface se carbonise, ses résultats sont plus indigestes que ceux de la cuite dans l’eau ou à la vapeur ; d’ailleurs, ces manières de les faire cuire sont difficiles à exécuter en grand : aussi ne sont-elles usitées que pour les régals.

Les châtaignes sèches se font cuire dans l’eau & se mangent comme les fraîches. On les réduit aussi en farine, qui se conserve dans des caisses ou dans des grands pots, pour en faire de la bouillie au moyen du lait ou de l’eau assaisonnée de beurre & de sel.

Voici le procédé que j’ai annoncé plus haut, comme le plus convenable à employer dans les pays à châtaignes, lorsqu’on veut ménager le temps & ne rien perdre de leurs parties mangeables :

» 1°. On pèle les châtaignes en ôtant leur écorce à l’aide d’un couteau, ce qui n’est pas bien diffi-