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L’uſage de ces bougies eſt facile. Lorſqu’on veut s’en ſervir, on rompt le tube à l’endroit marqué ; on jette le morceau ſupérieur qui a le bout plus pointu, & l’on tourne & retourne pluſieurs fois la bougie entre les doigts, en faiſant attention de faire toujours toucher le fond du tube à la mèche, afin qu’elle puiſſe toujours s’imprégner de tout le phoſphore & de tout le ſoufre. On la tire hors du tube environ un pouce ; on la repouſſe cinq à ſix fois au fond pour occaſionner un plus grand frottement ; on la tire enſuite totalement & avec promptitude, en ayant ſoin de tenir la mêche penchée du côté dé la terre.

Si l’air eſt ſec & chaud, la bougie s’enflammera tout de ſuite ; s’il eſt au contraire froid ou beaucoup humide, elle fera d’abord un peu de fumée, & tardera quelques ſecondes à s’allumer, mais dans les grands froids elle aura encore beaucoup plus de difficulté à donner une prompte flamme.

Pendant que la flamme ſort de la mêche, on fera tourner la bougie entre les doigts ; & auſſi-tôt qu’elle s’y ſera bien attachée, on la tournera en haut, & on la tiendra un peu horiſontalement juſqu’à ce qu’elle ſoit preſque toute conſumée.

Dans le commencement de l’inflammation, le moindre courant d’air, ou la reſpiration de la perſonne qui a retiré la bougie du tube, ou qui y eſt préſente, peut faire éteindre la flamme, qui eſt très-foible dans ce moment, parce que la force du phoſphore s’eſt évanouie avec la flamme dans un inſtant ; alors la bougie ne pourroit plus s’allumer. Ainſi il ne faut point reſpirer dans le moment qu’on voit paroître un peu de flamme, & la défendre du courant d’air avec un chapeau ou autrement.

L’extrémité du tube qui contient la mêche phoſphorique doit être obtuſe & non pas pointue, afin que les fils de la mêche puiſſent bien s’imprégner du phoſphore.

L’effet de ces bougies eſt beaucoup plus prompt, ſi au lieu de s’en ſervir tout de ſuite après les avoir finies, l’on attend trois ou quatre jours. Ces bougies étant allumées, on communique la flamme à des bougies ordinaires.

On doit prendre garde de ſe brûler avec le phoſphore, car il brûle dans un inſtant juſqu’à l’os. Le remède dans ces cas eſt de mouiller pluſieurs fois la partie avec du linge imbibé d’urine.

L’huile de cire, dont on a parlé plus haut, s’obtient, en diſtillant pluſieurs fois avec de la chaux, le beurre de cire ; dans les diſtillations de la cire, de cinq parties environ, quatre ſe convertiſſent en eau & une en huile,

On a ſoin de marquer avec un petit papier collé le bout du tube qu’il faut caſſer, afin de le reconnoître dans l’obſcurité. Tel eſt le procédé que pratique M. Peyla.

M. le comte de Challant publia à Turin une petite brochure ſur ce ſujet. Voici le procédé. Prenez deux tiers de benjoin & un tiers de ſoufre en bille ; réduiſez-les en poudre très-fine, introduiſez-les dans un tube ſoudé à l’une de ſes extrémités, ajoutez un douzième de grain de phoſphore, & faites fondre le tout à une chaleur de douze à quinze degrés ; mêlez exactement les matières avec un fil de laiton, lorſqu’elles auront pris une couleur rouſſe jaunâtre ; faites entrer une bougie dont la mêche aura été imbibée d’eſſence de canelle très-pure ; roulez-la dans le tube, juſqu’à ce qu’elle ſoit bien imprégnée de la compoſition phoſphorique, au point de voir le fond très-net ; ſoudez l’autre extrémité de ce tube, & la bougie ſera achevée.

On ſait que le phoſphore s’allume ſpontanément dans l’air, voilà pourquoi on le conſerve toujours dans l’eau. Il n’eſt donc pas étonnant qu’une bougie, préparée comme on vient de le dire, étant renfermée dans un petit tube où il n’y a preſque point d’air, où la circulation libre de l’air ne peut avoir lieu, puiſque les deux extrémités en ſont fermées hermétiquement, il n’eſt donc pas étonnant que cette bougie ne brûle pas dans le tube, & qu’elle ne s’enflamme que lorſqu’elle paſſera dans l’air libre. Car toute combuſtion exige de l’air vital en quantité ſenſible, & n’eſt qu’une décompoſition de ce gaz par des ſubſtances qui s’approprient ſon oxigène, lequel ſe ſépare alors en grande partie du calorique qui le tenoit en diſſolution. Selon quelques modernes, la combuſtion ſubite des bougies phoſphoriques, comme celle du gaz hydrogène phoſphoré, lorſqu’on les expoſe à l’air, eſt due au gaz phoſphoreux qui exiſte dans ces dernières circonſtances.

BOUGUER (Pierre). M. Bouguer fut de bonne heure formé dans l’étude des Sciences par ſon père. Les premiers objets qui s’offrirent à ſes regards furent des instrumens d’Aſtronomie & d’Hydrographie ; la langue des ſciences devint preſque ſa langue maternelle, & les premiers amuſemens de ſon enfance furent des inſtructions, circonſtance qui ne contribua pas peu, ſelon la remarque de M. de Fouchi, à développer de bonne heure les talens qu’il avoit pour les hautes ſciences ; auſſi étoit-il bon Mathématicien, longtemps avant que d’être ſorti de l’enfance, & étant au collége il enſeigna les Élémens de Mathématiques à ſon régent de cinquième. À l’âge de quinze ans il ſuccéda à ſon père, que la mort venoit d’enlever, dans la place de profeſſeur royal