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DISCOURS

A ce double bienfait, si propre à donner un grand mouvement à l’industrie Françoise, & à féconder les champs de la finance, on en ajouta d’autres encore les années suivantes.

Une déclaration du 24 novembre 1751, augmenta du double, le droit de fret sur les bâtimens étrangers, lequel n’étoit que de cinquante sols, & dont la modicité ne suffisoit plus pour les écarter de la concurrence avec les navires nationaux.

L’arrêt du 23 octobre 1753, déchargea de tous droits quelconques, tant à l’entrée du royaume qu’à la circulation, les fumiers, les cendres de houille & toutes autres matieres servant uniquement à l’engrais des terres.

En cherchant ainsi les moyens de fertiliser les campagnes, c’étoit, en quelque sorte, les assurer qu’elles ne perdroient rien à obenit des moissons abondantes. L’arrêt du conseil du 17 septembre 1754, rendit libre le commerce de toute espèce de grains dans l’intérieur du royaume, soit par eau, soit par terre, & même l’exportation fut permise, seulement par deux ports des provinces méridionales.

Cet essai, qui fut continué pendant dix années, & étendu, suivant les circonstances, à un plus grand nombre de ports, & à des débouchés par terre, produisit en 1764 le fameux édit du mois de juillet, qui accorde la pleine liberté d’exporter du royaume, & d’y importer des grains de toute espèce.

Ce règlement, dont les heureuses conséquences avoient été présentées à la nation par des gens parfaitement éclairés sur ses intérêts, produisit une révolution avantageuse pour les finances ; mais ses dispositions furent, dans la suite, souvent restreintes, modifiées ou suspendues, suivant l’opinion des administrateurs, & quelquefois par des motifs de prévoyance qui ne pouvoient pas être improuvés.

Dans l’intervalle de ces dix années, il se fit quelques opérations de finance qui ne doivent pas être oubliées, soit à cause de leur utilité, soit par rapport aux vues qui les avoient inspirées.

Une déclaration du mois d’août 1751, avoit ordonné que tous les bénéficiers du royaume donneroient, dans six mois, des déclarations des biens & revenus de leurs bénéfices. Malheureusement, ces dispositions sont restées sans exécution, & le gouvernement a perdu tout moyen de s’assurer si le clergé partage le poids des contributions publiques, dans une proportion mesurée sur les facultés & sur les avantages qu’il retire de la force du corps politique dont il fait partie. Voyez Clergé.

L’année suivante, le roi remit trois millions sur les tailles des habitans de la campagne. Mais les heureux effets de cette bienfaisance furent troublés peu d’années après,

    Il est vrai aussi que depuis plusieurs années, jusques vers 1751, le timon de la ferme générale avoit été entre les mains d’un homme qui joignoit à une ame élevée, toutes les vues d’un administrateur ; homme supérieur à son état, mais si éclairé sur tout ce qui se rapportoit aux finances, qu’il étoit devenu le conseiller intime, l’avocat consultant du ministre qui les gouvernoit. Il faut voir avec quelle force & quelle adresse il presse, il analyse, il disseque un projet de finance, pour en montrer les parties vicieuses, pour faire toucher au doigt la foiblesse de ses ressorts, & mettre en évidence les résultats fâcheux qui s’opposent à son admission. C’est le bon citoyen qui juge, & jamais le financier. Sa grande modestie fait pardonner ses grandes connoissances, & par-tout on reconnoît un homme également incapable d’intrigue & de flatterie ; un homme ennemi de ces voies sourdes & ténébreuses, par lesquelles des esprits bornés ou pusillanimes se traînent à leurs fins ; un homme toujours certain d’obtenir de sa compagnie, des suffrages qu’elle ne peut refuser à une éloquence persuasive & à un jugement solide ; ne pensant jamais à les lui arracher par des petites factions, ou par des menées insidieuses, qui peuvent captiver un moment, mais dont l’effet se termine par exciter la haine & attirer le mépris : on reconnoît enfin un homme naturellement porté à tout ce qui est noble & grand, qui n’eût pas moins bien été placé à la tête d’un sénat, qu’à celle d’une compagnie de finance, & auquel on n’a pu reprocher que peut être trop de délicatesse, pour sacrifier ce qui avoit toujours fait le secret de son corps, à la vaine ambition de conserver la faveur dont il jouissoit.