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DISCOURS

quences, que par les succès des grands ministres qui se sont attachés à les rejeter de leur administration. Ces ressources, ces moyens, furent des créations innombrables de charges, des augmentations de gages attachés à des supplémens de finances, des emprunts sans mesure & sans combinaison, & enfin une addition aux tailles, que la misere des campagnes força de diminuer les années suivantes. A toutes ces opérations désastreuses, on ajouta la réforme des monnoies, qui furent augmentées d’un dixième au bénéfice du roi ; c’est-à-dire, que le marc d’argent monnoyé fur porté à vingt-neuf livres quatorze sols, tandis qu’il ne valoit auparavant que vingt-six livres quinze sols. On comptoit cinq cents millions d’espèces dans le royaume. Le bénéfice paroissoit donc être à-peu-près de cinquante millions. Mais l’effet ne répondit point à des apparences si séduisantes : une défiance naturelle resserra l’argent de toutes parts ; les faux-monnoyeurs étrangers furent excités par l’appât du gain, & ils enlevèrent une partie de celui qu’on avoit espéré. Cependant on augmentoit les impôts, & une guerre générala faisoit languir le commerce. Le roi perdoit sur tout ce qui lui étoit dû par ses peuples, & ceux-ci perdoient avec les étrangers ; car s’il leur étoit dû, ils recevoient moins ; & s’ils devoient, ils payoient plus qu’avant la réforme. Une dette réciproque de dix millions, entre la France & l’Allemagne, ne pouvoit être payée qu’avec onze millions.

Tous ces expédiens, dont l’influence se faisoit fortement sentir sur les impôts de perception, s’épuisoient, & l’art inventeur des traitans, qui prenoient en parti les créations d’offices & les affaires nouvelles, étoit en défaut. La nécessité ramena en 1695, vers l’opération que les bons principes eussent dû indiquer au commencement de la crise : c’étoit l’établissement de la capitation, qui produisit cette même année environ vingt-un millions cinq cents mille livres, malgré le discrédit public, malgré le poids des droits sur les consommations dans les villes, & malgré la misere des campagnes : preuve certaine que six à sept ans auparavant, cette imposition eût facilement pu rapporter le double. La paix de Riswick vint, en 1697, mettre fin à la détresse causée par une guerre de douze années, qui coûtoit à la France au moins seize cents millions.

On avoit une dette énorme à payer ; on vouloit rembourser des rentes créées au denier quatre & au denier douze, supprimer plusieurs offices dont les attributions gênoient les arts ou le commerce.

Il fallut recourir à de nouvelles aliénations, à des traités extraordinaires d’offices & de rentes au denier vingt. Les premiers momens de la paix porterent aussi à s’occuper des moyens d’améliorer le commerce. On créa un conseil permanent pour cette partie, & on tenta d’anéantir ce préjugé national, qui fait croire qu’un homme noble, cesse de l’être, quand il se rend utile à l’Etat par des relations & des correspondances de commerce.

La guerre de la succession d’Espagne causa, dans les finances, un bouleversement inexprimable. On trouva d’abord des ressources dans une taxe sur les financiers, dans le rétablissement de la capitation, dans la refonte des monnoies, & dans la création de promesses de la caisse d’emprunt, de billets de monnoie, de rentes & de loterie ; bientôt elles furent épuisées.

C’est ainsi que se passerent les sept à huit premieres années de ce siècle. Depuis 1683 jusqu’en 1704, c’est-à-dire dans l’espace de vingt années, le bail des fermes générales étoit diminué de vingt millions, suite nécessaire de l’augmentation des charges, de l’altération des monnoies, & de la décadence du commerce. Personne n’osoit alors prendre ce bail pour plus d’un an, & on le prorogeoit ensuite.

La promotion de M. Desmarets, neveu de Colbert, à la place de contrôleur-général des finances, releva le crédit & ranima la confiance ; preuve qu’il est toujours intéressant de placer les hommes de