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PRÉLIMINAIRE.

la seule perception des droits du tarif de 1664.

Les ordonnances des mois de mai & juin 1680, celle de 1681, & celle du mois de février 1687; toutes faites sous Colbert, poserent des principes solides pour régler l’exercice du privilège exclusif de la gabelle & du tabac, pour fixer la perception des droits d’aides & des entrées de Paris ; & enfin, pour assujettir la manutention des douanes, & la levée des droits qui y sont dûs, à des formes qui pussent être aussi familières aux redevables qu’aux percepteurs.

Toutes les autres parties de la finance attirerent également son attention, & l’agriculture elle-même, qu’on accuse ce ministre d’avoir négligée, lui dut des encouragemens. C’est sous ce point de vue que se présentent la réduction des tailles & le fameux édit du mois de novembre 1666, en faveur des mariages. Il ordonna que tous sujets taillables, qui seroient mariés avant ou dans la vingtieme année de leur âge, demeureroient exempts de toutes contributions aux tailles, impositions & autres charges publiques, sans pouvoir y être compris avant l’âge de vingt-cinq ans accomplis. La même exemption fut accordée à tout père de famille qui auroit dix enfans vivans, non prêtres ou religieux, avec des pensions en faveur des gentilshommes, & des citadins des villes franches, qui auroient aussi dix enfans vivans.

S’il s’agissoit de faire l’éloge de ce ministre immortel, il faudroit rappeller en détail tout ce qu’il fit pour améliorer les finances ; il faudroit parler des grandes routes qui furent ouvertes, de celles qu’il répara, du superbe canal de Languedoc, qu’il entreprit, & de celui de Bourgogne, qu’il projeta. Toutes ces opérations font présentées dans son éloge, couronné en 1773, avec des couleurs dignes à la fois du ministre qui les a exécutées, & de l’homme d’Etat qui devoit bientôt devenir l’émule de sa gloire. Ainsi, en étendant, en ranimant la marine, la pêche, le commerce, les colonies, les arts & les manufactures, c’étoit, comme le dit son panégyriste, donner à la terre de nouveaux hommes à nourrit, & aux propriétaires de nouveaux objets de jouissance.

S’il ne permit par la sortie générale & illimitée des bleds ; c’est qu’en favorisant la population par les loix, & en l’encourageant par de nouvelles manufactures, il falloit bien en même tems assurer la subsistance des travailleurs qui se multiplioient, & des ouvriers de toute espèce qu’il avoit attirés dans le royaume, sans déranger les nouveaux rapports qui se trouvoient entre la récolte & la consommation. Dans ces conjonctures délicates, il ne pouvoit qu’autoriser momentanément & localement l’exportation ; car il n’étoit pas possible de savoir avec exactitude, om commenceroit la sortie du nécessaire, & où finiroit celle du superflu.

On a vue les finances rétablies par Sully, retomber dans le désordre & la confusion sous ses successeurs. Elles prirent, par les soins de Colbert, un nouvel éclat qui éblouit encore quelque tems après sa mort, arrivée en 1683 ; mais l’oubli des principes suivis par ces grands ministres, le défaut de méditation & de connoissances sur les sources & sur la nature des impôts, sur leur action réciproque des uns contre les autres ; la négligence de l’ordre & de l’économie dans la distribution des fonds publics, précipiterent une seconde fois les finances dans une subversion & un bouleversement dont un demi siècle a pu réparer à peine les fâcheux effets.

Le mouvement qu’un commerce animé, sous Colbert, avoit procuré à la circulation, continuoit encore, quoique ce ministre fût perdu pour la France, comme on voit un corps se mouvoir long-tems après l’impulsion qu’il a reçue. Mais en 1684, la guerre avec l’Espagne, la dépense du bombardement d’Alger & de Gênes, la disette de grains multiplierent tellement les besoins, qu’il fallut recourir à des ressources extraordinaires, à des moyens forcés, dont les vices sont aujourd’hui vivement sentis, autant par leurs funestes consé-