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PRÉLIMINAIRE.

ment l’idée, est un nouveau bienfait que le commerce reçut de M. Fouquet pendant son administration. Ce droit mérite d’autant mieux d’être remarqué, qu’il fut le fruit d’une saine politique, & qu’il eut pour but d’encourager notre navigation, en écartant de nos ports les bâtimens étrangers qui faisoient alors presque tout le commerce de province à province, qu’on appelle cabotage.

Indépendamment des désordres produits par l’excès des impositions, les abus produits par la diversité des droits de perception, subsistoient toujours, & l’augmentation des sols pour livre, créés en différens tems, en agravoit encore le joug sur le commerce.

Ces droits n’étoient pas les mêmes par-tout. Les provinces non sujettes aux aides, étoient moins chargées dans leur commerce avec l’étranger, que celles où les aides avoient cours ; mais aussi elles ne pouvoient commercer avec ces derniers, qu’en payant des droits dont celles-ci étoient exemptes dans leur relation entre elles.

De ce défaut d’égalité, qui est un vice essentiel dans l’administration d’un État, résultent plusieurs inconvéniens. Les moyens de recouvremens doivent être plus multipliés ; les frais augmentent ; il s’éleve plus souvent des difficultés entre le négociant & le préposé à la levée des droits, & dès-lors l’obscurité & l’incertitude s’introduisent dans la perception.

C’est là malheureusement le tableau de ce qui est arrivé dans les droits de douane ou de traites, de même que dans ceux des aides. Des besoins sans cesse renaissans se faisoient sentir. Le moment pressoit. On créoit un droit pour y subvenir. Une province proposoit un arrangement pour s’en affranchir. Il étoit accepté, & c’étoit un moyen de se procurer promptement des fonds que les conjonctures rendirent indispensables.

Mais il s’ensuivoit qu’une partie du royaume supportoit des charges dont l’autre partie étoit exempte, ou qu’elle n’étoit pas du moins assujettis dans la proportion d’égalité qu’un bon gouvernement doit maintenir entre tous les citoyens. De-là, plus d’union entre les sujets d’un même prince ; plus d’unité dans les formes de leur administration. La France étoit un corps monstrueux, dont chaque membre avoit ses difformités. Ainsi un même État sembloit composé de plusieurs État étrangers les uns aux autres ; chacun s’isolant dans ses jouissances particulières, ne vouloit en rien s’en relâcher pour concourir au point d’uniformité qu’exigeoit le bonheur général.

Telle étoit la situation de la plupart de nos provinces, lorsque Colbert fut appellé au gouvernement des finances en 1661[1]. Son premier soin fut de venir au secours du commerce, qui languissoit sous l’oppression des droits. Il descendit dans les détails de leur multitude, de leur variété, de leur produit, & de leurs effets. Il prit une connoissance sûre des avantages de leur suppression, auprès des négocians les plus considérables & les plus éclairés. Rien ne lui parut petit, parce qu’il étoit grand. Ses vues sublimes & bienfaisantes sont déve-

    d’avoir des principes bien réfléchis à l’égard du commerce. Recherches & considérations sur les finances.

  1. On ne peut rien ajouter au magnifique éloge qui a été fait de ce ministre en 1773, & auquel l’académie françoise a justement décerné la palme de l’éloquence. Il seroit impossible de développer avec plus de sagacité le génie & les motifs qui ont en tout tems dirigé M. de Colbert. Une tâche aussi difficile ne pouvoit être plus heureusement remplie que par un écrivain estimable, qui, par la profondeur de ses vues, étoit déja homme d’État, & que tous les bons citoyens ont vu avec transport remplir la même place que le ministre dont il avoit si bien loué les opérations. Voyez l’article Contrôleur-général des finances.