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PRÉLIMINAIRE.

On verra que sous les rois des premieres races, il se levoit sur les marchandises, des droits qu’on peut indistinctement appeller de douane ou de péage, puisque ces deux mots, avec ceux de redevance, de coutume, d’aide, de subvention & de gabelle, dénomination successivement donnée à ces deux sortes de droits, semblent désigner un impôt quelconque, perceptible, soit localement dans une certaine étendue de pays, soit généralement à l’entrée ou à la sortie du royaume.

On pense donc que les droits de douane qui se levoient dans les ports de l’empire Romain, eurent également lieu dans les Gaules, tant qu’elles en firent partie, & qu’ils continuerent d’y subsister lorsque Clovis fut parvenu à fonder son royaume sur les débris de l’autorité Romaine, dont une partie lui étoit confiée[1].

Ce n’est que plus de cent ans après le règne de Clovis, qu’il est question, dans les historiens, des droits que payoient les marchandises de toute espèce, & qui sont proprement les droits de douane.

Clotaire II, quatrieme roi de France, convoque un concile à Paris en 615. On y rapporte les représentations des peuples, contre la multiplicité des bureaux de douane ou péage, contre la quotité des droits, & contre la façon dont on les exigeoit. Ce prince rend un édit, pour faire défense d’établir désormais d’autres droits que ceux qui existoient sous ses prédécesseurs[2].

L’histoire de Dagobert, successeur de Clotaire, nous apprend que ces droits étoient levés par des officiers appellés Actores regii, préposés royaux, qui étoient établis receveurs dans les différens bureaux.

On y voit aussi que ce monarque ayant donné à l’église de Saint-Denis une rente de cent sols d’or, pour l’entretien du luminaire de cette église ; il en assigna le paiement sur le produit de la douane de Marseille, & qu’il chargea même les officiers de cette douane, d’employer ces cent sols à l’achat des meilleures huiles, & qu’enfin ces huiles devoient être chargées sur six voitures, & conduites à leur destination, avec affranchissement de tous les droits, soit en sortant de Marseille, soit dans les autres villes de la route, comme Valence, Lyon & autres[3].

Il paroît par un diplôme du même roi, en faveur du marché de Saint-Denis[4], que plusieurs de ces droits, sans qu’on sache quelle étoit leur quotité, se percevoient sur les marchandises vendues dans les foires & dans les places publiques[5] ; que d’autres avoient lieu au passage des

  1. Cette opinion a été adoptée aussi par un M. Gelée, correcteur en la chambre des comptes, qui a mis des observations à chaque article de l’ouvrage de Jean Hennequin, intitulé le Guidon général des finances, in-18, imprimé en 1605. Ces deux écrivains prétendent que Chilperic imposa le droit de huitieme sur le vin. Voyez les pages 15 & 172. Quoique l’on convienne généralement, d’après Grégoire de Tours, que Chilperic exigea unam amphoram, par arpent de vigne, cependant on n’est pas d’accord sur la continence du vaisseau amphora. M. l’abbé Dubos le traduit par un tonneau, & M. l’abbé de Mably par une cruche.
  2. De teloneo ut per ea loca debet exigi, vel de speciebus ipsis de quibus præcidentium principum tempore est exactum… Baluz. t. premier, pag. 23.

    Placuit nobis ut antiqua & justa telonea à negociatoribus exigantur, tam de pointibus, quam de navigiis seu mercatis, dit également Charlemagne, capit. lib. 3, cap. 12.

  3. Præceptumque taliter, ut tam ipsa Massilia quàm Valentia, Lugdunum, vel quocumque per reliqua loca transitus erat omne teloneum de sex plaustris quibus hæc videbatur deferri usquè quoad hanc basilicam peraccederent, omnimodis esset indultum. De gestis Dagoberti, cap. 18. Suivant Procope, les François furent absolument maîtres de la Provence & de Marseille, dès 539. Abrégé chronolog du Pré. Hénault, tom. premier, pag. 14.
  4. Continuation d’Aimoin, liv. 5, chap. 10, capitul. lib. 4, cap. 31.
  5. On a vu ce même impôt, établi d’abord par Auguste dans l’empire Romain, & étendu ensuite par Caligula.