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avec sa constitution d’état étranger, & avec les vues consignées dans l’arrêt du 16 mars 1734 : vues dictées par des principes politiques, dont la nature des choses exige la modification, sur-tout lorsqu’ils ne sont pliés aux circonstances, que pour l’utilité du gouvernement.

Ce moyen est de traiter ce pays comme nationale, dans son commerce avec le royaume, pour tout ce qui n’est pas objet de subsistance & d’industrie, & comme étranger dans ses relations étrangeres ; c’est-à-dire ; de l’assujettir aux droits d’entrée & de sortie ordinaire, sur tout ce qu’il tirera de l’étranger, ou qu’il y enverra directement.

C’est sûrement ici le cas le plus décidé, quand on considere que toute question sur ce point se réduit à savoir, s’il est avantageux ou préjudiciable à l’état, d’enrichir le Comtat d’Avignon, & que l’examen d’une carte de France la résout par l’affirmative sur la premiere proposition.

Qu’importe, en effet, que le Comtat paie moins d’impôts que les provinces voisines, si l’industrie de ses habitans, en prenant plus d’essor & d’activité, ne sert qu’à faire le bénéfice de ces provinces, & par conséquent y accroître la masse des richesses patrimoniales.

La position du Comtat est si précaire, que ce pays ne peut avoir aucune relation étrangere, que par ses voisins. Ce secours intermédiaire leur deviendra d’autant plus avantageux, qu’il sera impossible au Comtat de s’en passer. Ce seront ces voisins, qui lui fourniront les drogueries propres aux fabriques, les épiceries, les marchandises de nos colonies, les métaux de toute espece : autant de bénéfice pour le commerce françois.

De même les objets du cru & de l’industrie du Comtat, ne pouvant être portés à l’étranger que par des mains françoises : nouveau bénéfice pour l’état.

Toutes les productions du Comtat sont réduites à trois, par le sol & le climat. Des vins, des huiles & des soies. Autres motifs pour traiter le Comtat de maniere à y encourager la culture : car si ces richesses territoriales augmentent ; les jouissances des Comtadis se multiplieront & s’étendront. Où en chercheront-ils, si ce n’est en France. Tous, en général, n’y prennent-ils pas un état ? n’y consacrent-ils pas leur personne, au service de la chose publique.

D’ailleurs, tant que les productions du Comtat excéderont les besoins de ses habitans, elles reflueront dans le royaume. Elles y seront à d’autant meilleur marché, que l’abondance en sera plus grande, & que le pays est moins chargé d’impositions. Qu’en pourra-t-il arriver, si ce n’est de remplacer les denrées de la même espece, exportées à l’étranger, par les nationaux, en franchise, ou avec modération de droits : les huiles & les vins sont susceptibles de cette faveur : c’est un double avantage pour l’état.

Par cet arrangement, on obvie à tous les inconvéniens de la condition présente du Comtat, laquelle est difforme autant que bizarre, & les Comtadins se trouvent dans l’absolue nécessité de ne commerce qu’avec la France, ou de n’avoir aucune relation étrangere, que par l’entremise des François.

Toutes les fois qu’ils enverront eux-mêmes des marchandises à l’étranger, ou qu’il en arrivera pour leur compte immédiatement, elles ne pourront passer à leur destination, qu’en payant les droits ordinaires d’entrée & de sortie, de la province dont elles emprunteront le territoire, & il conviendroit seulement d’abolir à cet égard, toute prohibition & toute franchise.

Ainsi des matieres premieres de laine, coton, &c, destinées pour le Comtat, paieront les droits ordinaires à l’entrée & à la sortie de Provence ; au lieu que si elles étoient destinées d’abord pour un provençal qui les feroit passer en Comtat, elles n’acquitteroient aucun droit d’entrée, & ne seroient sujettes qu’à ceux de sortie.

A l’égard des denrées de subsistance, comme les grains, les bestiaux, & toute espece de comestibles dont il est intéressant de conserver l’abondance dans le royaume où elles jouissent de tout affranchissement à la circulation, elles seroient sujettes seulement aux droits locaux dûs de province à province, sans égard à la qualité de régnicole, qui seroit réduite à ne procurer que la faculté de posséder des biens & des offices ; de succéder, tester, &c.

Les étoffes de laine, coton & soie, ou mêlées de ces matieres, pourroient être introduites dans le royaume, en payant moitié en sus des droits ordinaires dûs sur les étoffes nationales, de la même maniere que ce traitement est établi par l’arrêt du 16 mars 1734, pour les seules étoffes de soie.

On pourroit, peut-être, même affranchir encore ces étoffes, de cette moitié de droits au-dessus de ceux que paient les étoffes nationales, & n’imposer que le quart, afin d’indemniser les Comtadins de la privation du titre de régnicole de Provence, quant aux droits de traites. Cette faveur, jointe à la levée de toutes loix prohibitives à leur égard, leur seroit infiniment plus avantageuse, & ils gagneroient en Dauphiné ce qu’ils perdroient en Provence : car la qualité de régnicole de cette derniere province, les assujettit aux droits de foraine dans leur commerce avec l’étranger, & avec les provinces du royaume où les aides n’ont pas cours ; au lieu que le Comtat, par ces principes établis, formant un état isolé, il seroit traité dans son commerce avec le Dauphiné, & les autres provinces du même rang, comme l’est cette province, dont il emprunteroit le passage ; en en payant que la douanne de Valence, & les droits locaux dûs sur la route.