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La contrebande en sel continuant toujours, on imposa, par arrêt du 28 juillet 1719, un droit de dix livres, & les quatre sols pour livre, sur chaque rasiére de sel, entrant dans les ports de Dunkerque, Calais, Boulogne & Etaples, à la destination de l’Artois. Voyez Boulogne.

Les états représenterent que cette imposition portoit une atteinte sensible à leurs privilèges ; que puisqu’elle avoit pour motif de diminuer l’abus du sel gris en Artois, ils croyoient ne pouvoir donner à sa majesté, des preuves plus sinceres de leur zèle pour son service, & du desir qu’ils avoient de concourir à la destruction du faux-saunage, qu’en consentant à ce que l’usage & le commerce du sel gris fussent interdits dans leur province.

Cette proposition ayant été agréée, il intervint le 29 février 1719, un arrêt du conseil qui révoqua celui du 28 juillet précédent ; défendit l’usage & le commerce du sel gris, à peine de confiscation, & trois mille livres d’amende, & permit le transport & l’usage du sel blanc, dans toute l’étendue de la province, avec la liberté d’en faire des magasins, excepté dans les paroisses situées dans les trois lieues limitrophes du pays de gabelles.

Un autre arrêt du 21 juin 1773, prescrivit de nouvelles précautions pour empêcher le faux-saunage qui se faisoit à saint Pol. Il fut défendu aux habitans d’avoir dans leurs maisons, une plus grande quantité de sel à la fois, que ce qui étoit nécessaire pour leur usage pendant six mois, à raison de cent livres, pour sept personnes par an, sous les peines portées par l’ordonnance.

Les déclarations des 9 avril 1743, & 13 mai 1746, ajouterent encore des formalités à suivre, pour le transport du sel & du tabac, dans les trois lieues frontieres de la Picardie, & pour établir une police uniforme relativement aux certificats qui doivent accompagner les transports. Elles fixerent aussi la quotité des amendes à prononcer par l’intendant, en premiere instance, dans les cas de contravention, suivant les quantités de sel qui seroient saisies, avec la clause, que les particuliers résidans dans l’intérieur de la province, ou ceux des provinces voisines sujettes à la gabelle, qui seroient surpris dans les trois lieues limitrophes, portant, voiturant, conduisant ou escortant du sel ou du tabac, sous tel prétexte que ce pût être, seroient poursuivis comme faux-sauniers ou faux tabatiers, de même que s’ils avoient été trouvés dans l’étendue des fermes des gabelles & du tabac, & sujets aux confiscations, amendes & peines prononcées par les réglemens.

La législation n’a point éprouvé de variations à cet égard depuis cette époque, & on voit par ce qui a été dit, qu’elle est également applicable au tabac ; c’est-à-dire, qu’il est défendu de faire des magasins, des transports, & le commerce de tabac, dans les trois lieues limitrophes de la Picardie, avec lequelle l’Artois confine.

L’Artois jouit relativement aux droits de domaine, de la même franchise qu’à l’égard de ceux de gabelle. La déclaration du 14 juillet 1699 le dispense du contrôle des actes ; & l’édit du mois de décembre 1703, des droits d’insinuation laïque. Mais cette province paie chaque année, par forme d’abonnement, la somme de cent soixante-onze mille sept cents cinquante livres, compris les dix sols pour livre, pour tenir lieu de tous les droits domaniaux, comme centieme denier, petit scel & droits d’usage, suivant l’arrêt du conseil du 23 décembre 1781.

Le droit de franc-fief s’y perçoit, comme dans toutes les provinces de l’intérieur du royaume, & sur le pied d’une année du revenu, depuis l’arrêt du conseil du 15 mars 1723 ; mais il ordonne que les possesseurs roturiers qui auront payé ce droit, en pourront, eux, ni leurs héritiers, être poursuivis ni inquiétés, tant & si longuement que les uns & les autres seront en possession des biens pour lesquels le droit aura été payé.

Quant aux droits de traites, l’Artois n’en est point exempt. Mais cette province est, avec la Flandre, le Cambresis & le Haynault, réputée étrangere. Elle en differe néanmoins en ce qu’elle ne renferme ni bureaux, ni commis de cette partie. N’ayant, par sa situation, aucune communication immédiate avec le pays étranger elle ne peut en recevoir aucune marchandise, ni en expédier à cette destination. Si elle en envoie en Picardie, elles sont sujettes au tarif de 1664. Lorsqu’elle en reçoit de l’étranger, elles ont nécessairement acquitté les droits dûs à l’entrée de la Flandre & du Haynault, provinces au milieu desquelles l’Artois est enclavé, & elles n’en ont plus à payer pour aller en Artois. Si pour y parvenir, des marchandises étrangeres ont passé par la Picardie, elles y arrivent de même en franchise, après avoir acquitté les droits des nouveaux arrêts, ou ceux du tarif de 1664, suivant leur espece.

Comme il se trouve en Artois, un point qui n’est éloigné du pays étranger que d’une lieue & demie, on a vue souvent des bandes de fraudeurs à cheval, chargés de marchandises de contrebande, ou d’especes sujettes à des droits considérables, franchir rapidement cet espace, & verser ces marchandises dans la province, au grand préjudice des fabriques établies en Flandres & dans le Haynault. Ces abus sont d’une pratique d’autant plus aisée & d’autant plus sûre, que la ferme générale n’a dans l’Artois ni employés, ni bureaux, & qu’elle est, par conséquent, sans aucun moyen pour réprimer ce désordre.

D’un autre côté, la communication libre dont l’Artois jouit avec la Flandre & le Haynault, sous la seule condition de faire accompagner les objets de son commerce, de certificats des gens de loi,