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FER – FER


man, que l’innombrable variété de ses propriétés, tient à des causes couvertes encore d’un voile très-épais.

Nous, ne suivrons pas plus loin le savant Suédois dans son analyse du fer, qui tient à une théorie profonde de la chimie, & qui cesse dès-lors d’être du ressort de ce Dictionnaire des Arts : Nous passons à la description de l’art, telle que nous l’offre l’ancienne Encyclopédie, en observant auparavant, que M. Bosc d’Antic, correspondant de l’Académie royale des sciences de Paris, rapporte dans un Mémoire sur le moyen de classer les fers connus, « qu’ayant fait un grand nombre d’expériences sur les fers de toute espèce, il a reconnu que les soufflures sont dues à une ou plusieurs matières hétérogènes, qui altèrent également la pureté & la bonté du fer & de l’acier.

Ces soufflures sont donc un moyen certain de juger, même au tact & les yeux fermés, de la pureté & de la bonté des différentes espèces de fer & d’acier.

C’est d’après cette pierre de touche, ajoute M. Bosc d’Antic, que nous croyons pouvoir classer tous les fers connus. Nous mettrons au premier rang celui de la Styrie, & au dernier celui de la Sibérie. Les intermédiaires suivent exactement l’ordre dans lequel nous allons les placer. Après le fer de Styrie vient celui du continent de l’Amérique septentrionale, de Dannémora en Suède, d’Espagne, de Bayonne, du Roussillon, du Comté de Foix, du Berry, du Thierache, de Suède des secondes marques, le fer commun de France, celui de la Sibérie.»

Des grosses forges.

On appelle grosses forges, les usines où l’on travaille la mine du fer.

La manufacture du fer, le plus nécessaire de tous les métaux, a été jusqu’ici négligée. On n’a point encore assez cherché à connoître & suivre une veine de mine ; à lui donner ou ôter les adjoints nécessaires ou contraires à la fusion, & la façon de la convertir en fers utiles au public. Les fourneaux & les forges sont pour la plupart à la disposition d’ouvriers ignorans. Le point utile seroit donc d’apprendre à chercher la mine, la fondre, la conduire au point de solidité & de dimension qui constituent les différentes espèces de fer ; à le travailler en grand au sortir des forges, dans les fonderies, batteries, & fileries ; d’où il se distribueroit aux différens besoins de la société.

Le fer remue la terre ; il ferme nos habitations ; il nous défend ; il nous orne : il est cependant assez commun de trouver des gens qui regardent d’un air dédaigneux le fer & le manufacturier. La distinction que méritent des manufactures de cette espèce, devroit être particulière : elles mettent dans la société des matières nouvelles & nécessaires ; il en revient au roi un produit, considérable, & à la nation un accroissement de richesses égal à ce qui excède la consommation du royaume, & passe chez l’étranger.

Pour mettre cette partie sous les yeux, en attendant de plus amples connoissances, on a suivi l’ordre du travail & des opérations.

La première regarde les qualités du maître, commis, & principaux ouvriers.

La seconde, la recherche des minières, & disposition des mines.

La troisième, la manière de tirer les mines.

La quatrième, les réglemens à ce sujet.

La cinquième, la façon d’en séparer les corps étrangers.

La sixième, les réservoirs & dépense de l’eau.

La septième, l’achat, l’exploitation, l’emploi des bois.

La huitième, le service qu’on tire de l’air.

La neuvième, le fourneau pour gueuses & pour marchandises.

La dixième, la forge.

La onzième, la fenderie.

La douzième, la batterie.

La treizième, la filerie.

On n’entreprend’ pas de détailler chaque forge en particulier ; il n’est question que d’une description générale d’un travail susceptible de modifications, suivant les circonstances particulières.

Article I. Du maître.

La probité & l’honneur sont les premières choses que tout homme, dans_toutes sortes d’état, ne doit jamais perdre de vue. Dans les forges, le danger est prochain. Communément au milieu des campagnes, souvent au milieu des bois, nécessairement environné d’un grand nombre d’ouvriers & de domestiques ; il faut veiller pour se garantir des vices qu’engendrent la solitude, la grossièreté des ouvriers, le maniement de l’argent.

Soyez bon voisin, confrère sans jalousie, ami avec discernement ; faites vos achats & vos ventes sans mensonge ; vendez vos denrées en bon citoyen ; distribuez votre argent en bon économe ; veillez au travail ; faites vos fournitures de bonne heure ; ne laissez pas manquer votre caisse.

Il faut à un maître de forges la connoissance de son état, de la santé, de l’ordre, & de l’argent. Comme le gouvernement d’une forge s’étend à beaucoup d’objets différens, un petit détail fera voir les soins & les démarches qu’il demande.

Vous proposez-vous de bâtir, acheter, ou prendre à bail une forge ? Combinez votre santé, votre argent, avec la connoissance du terrain, des héritages voisins, du cours d’eau, des bois, des mines, de la qualité du fer, du débit : voilà le premier pas.

Je dis votre santé, par le travail attaché à cet état : votre argent, pour ne pas trop entreprendre : la connoissance du terrain & des héritages voisins, tant pour la dépense & la solidité de la construction, que pour le danger de se jeter dans des dédommagemens ; du cours d’eau, pour lui opposer une force capable de la retenir, ménager des sorties pour l’excédent, & des réservoirs pour le néces-