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dicatif de la construction, il lui donne la liberté de supposer que cet espace est un vide, au travers duquel on peut apercevoir ou le ciel, ou toute composition d’objets et de figures présumées en l’air et supportées sur des nuages.

Il est d’autres superficies que l’architecte abandonne au pinceau du décorateur, comme étant des percées, dont l’apparence n’affecte en rien, pour les yeux, le sentiment ou l’effet de la solidité ; mais c’est que des membres d’architecture ou des massifs de construction rassurent la vue, et servent d’encadrement aux compositions du peintre. Celui-ci est donc tenu de se renfermer fidèlement dans les limites qu’on lui prescrit, sinon il détruit pour l’œil l’ordonnance du bâtiment, et en altère le principe essentiel qui est la solidité, sinon réelle, du moins apparente.

Nous ne dirons rien ici de la peinture, soit qu’elle consiste en tableaux isolés, qui ont un cadre, soit que de semblables objets soient peints sur mur à fresque ou autrement, mais avec des encadremens peints et figurant des tableaux. Ces sortes de peinturestrouvent place sur une multitude de superficies, et se considérant comme des objets mobiles, ils donnent beaucoup moins de prise à la critique dont on vient de toucher les principaux points ; savoir, que la peinture ne doit jamais faire invasion sur les parties constitutives des ordonnances, et que jamais, lorsqu’elle est appliquée à ce qu’on appelle les pleins ou les masses de la construction, elle ne doit y traiter de ces sujets qui exigeant des lointains et des perspectives, produisent l’effet du vide, là où l’apparence du plein est nécessaire. La théorie sur ce point est la même pour l’emploi de la peinture que pour celui du bas-relief, qui régnant sur les entablemens d’un édifice, sur le nu d’une colonne, ne doit se permettre que le moindre nombre de plans possible, de peur d’altérer l’intégrité du parement, et de fausser tout te système de l’architecture.

Le second rapport qui unit la peinture à l’architecture, est, avons-nous dit, celui de l’emploi des couleurs, comme enduits sur les surfaces variées des bâtimens.

Les emplois de ce genre ne laissent pas que d’être nombreux, et ils ont lieu soit dans les extérieurs, soit dans les intéurs.

Il est assez reconnu et avéré aujourd’hui, par les ruines de beaucoup de temples d’une assez haute antiquité (voyez PAESTUM), que leurs colonnes et toutes les parties de leurs constructions, lorsque la pierre étoit surtout d’une qualité rebelle à un beau poli, se revâtissoient d’une couche légère de stuc, qui recevoit des couleurs probablement imitant celles des marbres. Ainsi ont été colorés tous les temples doriques de la Sicile, et la peinture qu’on y introduisoit, s’appliquoit avec des teintes diverses aux fonds des mé-


topes, aux mutules et aux détails de leur modénature.

Le luxe des marbres fut si commun dans l’antiquité, qu’un édifice qui n’eût offert qu’une pierre commune, auroit semblé être d’une pauvreté peu convenable, surtout à un temple. Les Anciens savoient aussi faire changer de couleur aux marbres. Pline nous apprend que d’un marbre blanc on faisoit un marbre numidien, en y insérant les veines et les teintes qui le falsisioient ; à plus forte raison dut-ou employer la peinture à colorer les enduits des colonnes qui n’étoient que de briques : telles sont toutes celles qu’on trouve en très-grand nombre, restées debout dans les ruines de Pompéii. On voit encore sur toutes, et la couche de stuc dont la brique étoit revêtue, et les teintes bien conservées des couleurs dont ce stuc étoit peint.

Nous ne pouvons guère douter que la peinture ait été employée comme enduit au dehors de beaucoup de maisons anciennes. L’usage s’en est conservé plus ou moins dans un grand nombre de villes d’Italie. Celle de Gênes, entr’autres, a porté ce luxe extérieur des bâtimens, au point de faire entrer jusqu’à la dorure, dans les couleurs dont plus d’un palais a reçu la décoration.

En général il faut dire que le goût pour ce genre d’orner l’extérieur des bâtimens, ainsi que l’usage qu’on en fait, tiennent à la nature ou à la qualité es matériaux dont on dispose. Les plus favorables à cette pratique sont les revêtissemens qui ont lieu avec des mortiers où il entre de la chaux, et ce qu’on appelle des stucs. La chaux elle-même devient la préparation sur laquelle s’enduisent les couleurs.

Mais les pays où l’on construit beaucoup en bois, où cette matière forme non-seulement les charpentes, mais les panneaux de revêtissement, ces pays, disons-nous, doivent employer moins par goût encore, que par nécessité, la peinture à l’extérieur des maisons. Ainsi voit-on à la Chine et à Constantinople toutes les façades des habitations particulières peintes de toutes couleurs : ce qui ne laisse pas de produire un coup d’œil fort agréable, au dire des voyageurs.

Il semble assez inutile de répéter ici, que la peinture forme la plus grande partie des ornemens, dans l’intérieur des maisons et des appartemens, soit qu’on l’emploie en teinte plate et unie sur let lambris, les portes, les boiseries, les chambranles, les murs, les cloisons, les plafonds et les planchers, soit que ces enduits reçoivent des compartimens de toute sorte de dessin, en rinceaux, en arabesques, en détails décoratifs. Voyez DÉCORATION.

On auroit plutôt fait de dire ce qui, dans les édifices, ne reçoit pas le concours des couleurs et de leur application, que ce qui en réclame nécessairement l’emploi, tant sont nombreux les besoins que les matériaux en ont pour leur propre