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Beaucoup de parties et de masses de l’élévation permettent de se faire une juste idée des proportions et du tout, des fenêtres, des ouvertures et des couvertures, et il n’y manque aucun des détails propres à en restituer l’ensemble. Mais on en réserve la description à l’article Spalatro. Voy. ce mot.

Il seroit maintenant difficile suivre par quelqu’indication formelle des monumens, l’histoire abrégée du goût et de la disposition des palais dans cette nuit des arts, qu’on appelle du nom de moyen âge, sans avoir recours aux notions du genre gothique et des châteaux, dont à peine il reste des fragmens ou des traditions confuses.

On seroit obligé de franchir un assez grand nombre de siècles pour arriver en Italie, par exemple, au palais ducal de Venise, dont toutefois le goût diffère encore sensiblement de celui de nos châteaux construits sous le règne du régime féodal. L’Italie n’eut pas à beaucoup près, dans ce temps, le même système que le reste de l’Europe ; la féodalité n’y poussa point des racines aussi profondes et ne s’y étendit pas sous les mêmes formes. On ne vit pas ce pays hérissé de châteaux forts, dont les seigneurs, en guerre avec leurs voisins et leurs souverains, habitoient des bastions au lieu de palais, et retranchés derrière leurs fossés et leurs ponts-levis, n’avoient guère à s’occuper de la beauté intérieure ou extérieure de leurs habitations. Il paroît certain qu’en Italie, le goût de l’antique architecture ne cessa jamais entièrement, sinon de dominer, au moins d’influer dans les édifices de tous les âges. Trop de modèles s’en étoient conservés, pour que le genre gothique pût en faire disparoître la trace. Aussi le voyons-nous reparoître dès les douzième et treizième siècles. Le quatorzième et le quinzième surtout virent élever à Florence des palais dont les masses et les détails rappellent les formes et les élévations colossales des Romains. Il suffit de nommer Bruneleschi et le célèbre palais Pitti, pour se convaincre qu’aucune tradition, aucun mélange de la bâtisse gothique n’existoit à cette époque.

Cette époque étoit encore celle où l’on ne trouvoit en France que des châteaux qui, construits dans le système de défense militaire alors en usage, n’avoient aucun rapport avec l’architecture greco-romaine, aucune ressemblance avec ce qu’on est convenu d’appeler un palais. Ce qu’on appela même ainsi par la suite, et jusqu’au renouvellement du bon goût, ne fut, dans les demeures des rois, des princes et des grands, que des assemblages de tours rondes ou carrées, réunies dans de grandes cours, par des corps de bâtimens surmontés de toits fort exhaussés, ne présentant au dedans et au dehors que des masses de pierres, percées d’ouvertures sans ornemens. Tel étoit le plan et telles étoient les élévations des palais du Louvre et dus Tuileries avant le seizième siècle. Tel avoit été ce qu’on nomme aujourd’hui le Palais, dont il ne reste plus de trace de son ancienne structure que dans la grande tour qu’on appelle la tour de l’horloge, et dans quelques constructions circulaires du même genre. On peut encore voir des restes de cette ancienne disposition des palais de ce temps au château de Vincennes, malgré les modifications nombreuses que cet ensemble a subies.

Ce type des châteaux forts étoit tellement devenu celui des palais les plus magnifiques, que le palais de Chambord, qui fut la merveille de son temps, et qui fut commencé à bâtir sous François Ier., en 1523, est encore une répétition de la même disposition. Toujours des tours rondes, interrompues par des corps de bâtimens flanqués d’autres tours ; et cependant, à l’époque où s’élevoit ce célèbre château, l’Italie étoit déjà couverte de palais où l’on voyoit revivre, dans toute la régularité des formes et des ordonnances antiques, les masses, les détails, les proportions de la plus belle architecture. Déjà Bruneleschi, Léon-Batista Alberti, Ammanati, Bramante, San Gallo, Scamozzi, avoient élevé ces palais sur lesquels les architectes continuèrent d’aller former leur goût. Il suffit de citer les palais du Vatican, de la Chancellerie, à Rome, le palais Farnèse, le palais Strozzi, à Florence, le palais de Caprarole, par Vignole. Enfin, c’est de cette époque ou à peu près que date cette longue suite de palais, peut-être plus élégans, dont Palladio a donné les modèles, et qui ont si puissamment contribué à répandre le bon goût de l’architecture et à le naturaliser dans toute l’Europe. Voyez Palladio.

Ce goût ne tarda point à entrer en France : Primatice, Serlio et plusieurs autres y furent appelés, et bientôt on vit le Louvre changer tout-à-fait de forme sous le crayon de Pierre Lescot. Enfin, disparurent ces restes de gothicité qui s’opposoient à ce qu’un palais soumis à une ordonnance régulière reçût les formes, les colonnes, les profils de l’architecture grecque. D’essais en essais, de changemens en changemens, le Louvre est enfin devenu un des plus grands et des plus magnifiques ensembles de palais que l’or puisse citer, surtout depuis que, dans le siècle suivant, Perrault eut décoré sa façade d’entrée, de cette superbe colonnade qui lui a donné un extérieur de magnificence, dont on ne sauroit trouver l’égal dans aucun autre palais.

Le dix-septième siècle fut celui peut-être qui vit s’élever, dans la plupart des États, le plus de palais, et les plus riches et les plus somptueux. Malheureusement le goût de l’architecture avoit déjà perdu de sa noblesse et de sa simplicité, et l’amour de la variété en avoit corrompu les formes.

Il faut excepter cependant l’Angleterre, où l’école de Palladio s’étoit naturalisée. On doit re-