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voûtes des nefs de ces églises. Rien n’explique mieux ce système, en apparence hardi et compliqué, que le principe de transposition des combles de charpente, en combles à voûte d’arête.

La seule construction en pierre, n’auroit jamais pu inspirer, ni ces hardiesses, ni ces croisemens de nervures, ni ces élancemens de supports, ni ces porte à faux de cul-de-lampe suspendus, qui ne peuvent être autre chose, que la représentation des poinçons dans les assemblages de la charpente. Quand l’histoire et les saits ne nous l’attesteroient pas, les monumens eux-mêmes nous disent, par toute l’économie de leur disposition intérieure, par celle des arcs-boutans extérieurs, qu’ils ont remplacé des églises précédemment formées de charpente, surtout dans les sommités de leurs élévations, et qui avoient besoin d’être étayées en dehors, par des bâtis en contre-sorts. Qui ne sait en effet, que telles étoient les églises gothiques, avant leur reconstruction en pierre ? Qui ne sait que, par exemple, l’église de Saint-Germain-des-Prés à Paris fut brûlée une sois par les Normands, et qu’ayant été rebâtie en bois, les Normands la détruisirent une seconde fois, et en emportèrent les bois. Il existe encore à Honfleur une église gothique entièrement construite en bois. Or, de tout cela on peut conclure que les voûtes gothiques et tout l’appareil de leurs constructions, ne surent qu’une imitation des assemblages de charpente.

De tous ces faits il est donc permis de conclure, que le vrai principe originaire de la construction des voûtes en pierre, se trouve toujours et partout, dans les constructions en bois, qui seules étoient douées de la propriété de couvrir de grands espaces vides, de porter avec économie, à une hauteur indéfinie, les couvertures des bâtimens, et de s’adapter à toutes leurs formes, à toutes leurs dimensions.

La chose acquiert une probabilité plus grande encore, par l’exemple de l’Egypte, où, comme on l’a dit, on ne sauroit citer ni une partie de bâtiment circulaire, ni un intérieur couvert dont l’espace excède la dimension des dalles de pierre, qui y forment le seul moyen de couverture.

Si en effet l’Egypte eût pu arriver à la pratique des voûtes, elle l’auroit dû a ce double procédé de la bâtisse eu pierre, où nous ne nions pas qu’on puisse trouver un essai, et une sorte d’ébauche de l’art des voûtes. Nous voulons parler des pierres posées en dos d’âne, ou taillées de manière à former encorbellement. Or, comme nous l’avons déjà dit, il n’est d’aucune importance pour cette théorie, jusqu’à un certain point mêlée de faits et de conjectures, qu’on ait, ou qu’on n’ait point d’autorités certaines, sur l’existence de véritables voûtes en Egypte. Il nous suffit que le système, et tous les procédés de son architecture, nous démontrent d’une part, qu’on n’y reconnoît aucune trace d’un emploi primitif du bois ; de l’autre,


que tout son ensemble et toute ses parties, reposent sur le seul procédé de la taille et de l’emploi de la pierre.

Nous n’avons pas prétendu exclure entièrement le travail des pierres en architecture, de la propriété qu’il auroit pu avoir, d’enseigner par ses essais, et de propager l’art des voûtes, il n’y a rien d’exclusif en ce genre de notions, soit qu’on interroge la nature des choses, soit qu’on consulte un certain ordre de faits ou d’autorités. Ainsi quoiqu’il nous ait paru, qu’en Grèce, la construction en bois ait dû immanquablement conduire à faire des voûtes en pierre, comme ayant été la construction primitive et la plus ordinaire, il est impossible d’affirmer, et il seroit déraisonnable de prétendre, que dans ces siècles reculés, on n’ait jamais employé la pierre dans les édifices.

Or il se rencontre aux plus anciens monumens construits en pierre, dans la Grèce comme dans l’Egypte, certaines dispositions de matériaux, qui, ayant eu pour objet de suppléer à l’art des voûtes, purent aussi contribuer à y conduire les les constructeurs. On veut parler de quelques constructions en pierres polygones, d’un assez grand volume, disposées de manière à pouvoir remplacer la longueur d’un seul bloc, pour servir de linteau à une ouverture de porte. Nous avons parlé aussi, des pierres inclinées dans les couduits de la grande pyramide, en Egypte. Qui pourroit dire, que ce qui devoit faire sentir le besoin de tailler les pierres en claveaux, n’en auroit pas suggéré l’idée, et amené la pratique, bien que nul témoignage n’en dépose, dans les ruines effectivement assez rares, de ces anciens temps ?

Il nous paroît inutile d’insister davantage sur des opinions plus ou moins conjecturales à cet égard. Nous avons déjà vu, que ceux qui réunirent des pierres dans un cercle horizontal pour faire, par exemple, un puits, auroient bien pu aussi, sans un grand effort de génie, faire de ce cercle horizontal, un cercle placé verticalement, c’est-à-dire une arcade ou une porte cintrée.

Ce n’est donc point dans ce procédé sort simple et si peu étendu, qu’il faut placer l’art et la science de voûtes. Quoique ce cintre en soit l’élément, et si l’on veut le premier pas, et que cet essai soit dû au travail de la pierre, on doit considérer, qu’il y a deux points de vue assez distans l’un de l’autre, dans la théorie que ce sujet comporte ; l’un qui peut se borner au sait matériel d’un procédé mécanique, l’autre qui embrasse et comprend ce qu’on peut appeler le génie de la construction, dans l’art de voûter. Il est sensible, que c’est dans les grandes entreprises des voûtes sphériques, dans les couvertures de salles immenses, et d’intérieurs prodigieusement exhaussés, qu’il faut faire consister ce qu’il y a de vraiment remarquable dans l’art de voûter. Or, c’est ce génie, ce goût, ce genre hardi de structure qui nous semblent n’avoir pu être inspirés, que