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avoit disparu, excepté dans cet sortes de travaux de manufacture, que les corporations ouvrières de ce temps, pratiquoient et perpétuoient. La peinture sur vitres fut de ce nombre. Elle continua d’être appliquée, soit en ornemens, dans les compartimens des grandes rosaces, et dans les encadremens ; soit en compositions de figures, dans les panneaux des grandes fenêtres, qui furent ainsi converties, si l’on peut dire, en tableaux.

Ces tableaux, dont quelques belles substances colorantes faisoient le charme, et dont le soleil ou la clarté du jour faisoient l’effet, étoient composés d’une multitude de petites pièces de verre, les unes coloriées dans la verrerie ; les autres revêtues de couleurs superposées, et réunies comme un travail de marqueterie, par de petites bandes de plomb, ou affermies par de petites tringles de fer. Mais la hauteur où étaient ces vitraux, et la distance d’où on les voyoit, rendoient peu sensibles ces sortes de ligamens, qui, en interrompant la continuité des parties, seroient un grave inconvénient vus, de près, et surtout dans des ouvrages soumis aux convenances d’une véritable imitation. Il n’étoit d’ailleurs question, pour le goût de ces temps, et, en raison des connoissances d’art répandues alors, que de plaire aux yeux, par un mélange brillant et varie de toutes sortes de configurations coloriées.

Or, on ne sauroit nier que ce spectacle de vitraux coloriés, n’ait été, dans les églises gothiques, un de leurs principaux mérites ; et n’ait contribué, par un effet mystérieux, à produire des impressions conformes aux sentiment religieux. Ce genre de décoration, né avec le système de la bâtisse gothique, devoit, dans chaque pays, subsister autant que le goût auquel il avoir été approprié.

La renaissance des arts de l’antiquité, c’està-dire du goût de la véritable imitation, devoit, en ramenant l’architecture et la peinture, aux principes de l’ordre, et de la vérité naturelle, discréditer l’emploi d’un genre et d’un procédé de peinture, plus soumis à la pratique routinière des manufactures, qu’au talent et au génie de l’artiste. La peinture renaissante en Italie, s’empara de nouveau de la décoration des églises. Aussi voyons-nous dès le quinzième siècle, disparoître la peinture sur vitres, malgré les améliorations qu’elle avait elle-même éprouvées.

La France suivit, mais plus tard, et plus lentement, le mouvement imprimé en Italie, à tous les arts d’imitation. Le goût gothique beaucoup plus répandu par l’architecture, et surtout par celle des églises, n’y fut réellement déraciné que dans le dix-septième siècle. Déjà la peinture était arrivée à un très-haut point, mais plus d’une circonstance l’avoit empêchée de prendre son essor, dans la décoration des églises. Aussi voyons-nous encore dans ce siècle, des vitraux d’église et de cloître, perpétuer l’ancienne pratique, toutefois avec un meilleur goût de composition, de dessin et de couleur. Il devoit cependant arriver, et il arriva, qu’en France au dix-septième siècle, comme en Italie au quinze et seizième, la véritable peinture employée selon le génie qui lui convient, et appliquée à ses plus nobles emplois, dut faire tomber dans l’oubli la peinture sur vitres ; et l’on voit que cette sorte d’art, liée au goût de la construction, gothique disparut avec elle.

Dans la vérité, le succès qu’elle avoit eu en l’absence de la véritable peinture, dut discontinuer, lorsque celle-ci lui opposa, et la science du dessin, et la grandeur des compositions, et la vérité du coloris, et la facilité du transport, et les variétés des tons, ses procédés et l’économie de son exécution. Il est en effet dans la destinée de la peinture sur vitres, de ne pouvoir être employée qu’en fenêtres, et de ne pouvoir recevoir son effet que de la transparence de la matière ; ce qui fait qu’elle ne peut s’accommoder que d’une seule position, lorsque toute espèce de local est propre à recevoir les autres sortes de peinture. Son très-grave inconvénient est encore, de ne pouvoir exister que sur la matière la plus fragile, de ne pouvoir se pratiquer que sur des assemblages dé carreaux de verre, plus ou moins multipliés, ce qui offre à la composition et à l’ensemble des figures, plus d’un genre de difficultés et de désagrémens.

D’ailleurs ce genre de magnificence, noble mais triste, dont on décoroit les églises, offroit de plus grands inconvéniens dans les palais des princes. Il produisoit à leur intérieur une sorte d’obscurité, surtout quand le sujet qu’on peignait étoit riche et composé. La difficulté d’ouvrir les châssis des fenêtres, et la crainte de casser les vitraux, empêchoient de renouveler l’air, et l’interception des rayons de la lumière ajoutoit a l’insalubrité. Cette réunion d’inconvéniens fit décheoir la peinture sur vitres avec tant de rapidité, que le célèbre Palissy fut obligé d’y renoncer. Il tourna son talent du côté de la poterie, et se réduisit, pour vivre, à peindre sur la faïence.

Voilà les vraies considérations qui tendent à expliquer la désuétude de ce genre d’art, désuétude qu’on ne sauroit attribuer, comme on a pu le voir (voyez Verre (Peinture sur)), à l’ignorance des procédés, qui n’ont jamais manqué de se reproduire de temps à autre, dans des essais que le goût régnant et celui de l’architecture ont nécessairement manqué d’encourager.

Ce besoin de nouveauté qui tourmente les sociétés modernes, et qu’on ne trouve guère le moyen de satisfaire qu’en ressuscitant de l’ancien, a tenté depuis un certain nombre d’année, en Angleterre surtout, de faire rétrograder le goût de bâtir jusqu’au gothique, et on a vu des églises nouvelles bâties à neuf dans ce système. Faudroit-il attribuer à cette bizarrerie en construction, l’idée de renouveler aussi le genre de

Diction. d’Archit. Tome III
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