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Comme architecte, Vasari nous paroît mériter d’être cité, sinon parmi les premiers maîtres de cet art, et ceux dont un génie particulier a rendu les productions classiques, du moins entre les hommes ingénieux et habiles qui, sans s’écarter du bon goût, ont su connoître et mettre en œuvre des ressources que l’artiste doit souvent à son esprit, plutôt qu’à l’étude. Dans cet art, Vasari eut encore moins de maîtres qu’en peinture. Lui-même nous apprend nue pour se rendre de plus en plus utile au duc Alexandre de Médicis, qui s’occupoit beaucoup de fortifications, il se mit à étudier la construction et à faire des études d’architecture. L’entrée à Florence de Charles-Quint en 1536 lui fournit bientôt l’occasion de travailler avec Tribolo aux dessins d’arcs de triomphe et de décorations, qui furent commandés pour la réception de l’empereur. Deux ans après, Vasari étoit à Rome pour la seconde fois. Là il passa tout son temps (nous dit-il) à dessiner tout ce qu’il avoit omis dans son premier voyage, et en particulier les objets que la terre receloit sous les ruines de l’antique Rome. Il ne négligea aucun ouvrage d’architecture ou de sculpture, et le nombre des dessins qu’il fit alors monta à plus de trois cents. Voilà d’après son propre récit à quoi se bornèrent ses études en architecture.

L’élévation à la chaire de Saint-Pierre du cardinal di Monte sous le nom de Jules III, donna à Vasari l’occasion d’entreprendre un véritable ouvrage d’architecture. Le cardinal, passant par Florence pour se rendre au conclave, pronostiqua qu’il seroit pape, et engagea Vasari, si sa prédiction se réalisoit, à venir le trouver à Rome. Vasari n’eut pas plus tôt appris l’exaltation du nouveau pontife, qu’il se rappela l’invitation et se hâta d’y répondre. Le pape l’accueillit de nouveau, et lui ordonna la construction de cette maison de campagne, située hors de la porte del Popola, dont on appelle aujourd’hui les restes, Vigna di Papa Giulio. Vasari en fut le premier architecte, et il paroît que la plus grande difficulté qu’il y éprouva, fut de satisfaire à tous les caprices du pape, qui ne savoit à quoi fixer ses idées. Plus d’un architecte y succéda à Vasari. Vignola fut celui qui poussa le plus loin cet édifice. Il paroît qu’il n’y reste plus du premier ordonnateur que la grotte ou fontaine souterraine, au-dessus de laquelle Ammanati construisit une fort belle loggia. De toutes les dépenses du pape, et des travaux de tant d’habiles architectes, il ne subsiste plus guère aujourd’hui qu’une espèce de ruine, où l’ou va encore avec plaisir chercher des détails de goût, et de précieux vestiges de la belle manière du seizième siècle.

Vasari revint bientôt à Florence, où de plus importantes entreprises alloient lui offrir de plus heureuses occasions de montrer son talent en architecture.

De ce nombre fut, sans aucun doute, celle du


grand édifice appelé encore aujourd’hui gli Uffizi, quoique, par un heureux changement de destination, il soit devenu spécialement le Muséum d’arts, nu ce qu’on appelle maintenant la Galerie de Florence. Nous ne parlerons pas ici de l’heureuse distribution de ce magnifique local, certainement le plus beau et le mieux accommodé qu’il y ait à son emploi. Nous bornant à l’extérieur de ce monument, nous dirons que Vasari s’y montra architecte, ingénieur et constructeur habile.

Cet édifice, composé de deux ailes parallèles de 210 pas de longueur, réunies à leur extrémité, sur le quai qui horde l’Arno, par un corps de bâtiment qui les rattache, dans une longueur de 70 pas, forme une sorte de cour environnée dans ses trois côtés de portiques, dans lesquels Vasari a, peut-être pour quelques raisons de solidité, adopté un parti d’ordonnance un peu compliqué. Au-dessus de ces portiques règne un attique que surmonte un étage de grandes fenêtres cintrées. Quoique toute cette composition ne soit point un modèle de pureté, on ne peut s’empêcher d’y admirer un assez bel accord, et généralement un parti aussi heureusement conçu que bien exécuté. Les détails que Ruggiei en a donnés dans sa Scelta d’architetture di Fiorenza, sont généralement purs et corrects, si l’on excepte quelques caprices d’ornemens de portes, en place de frontons, qui étoient devenus comme une mode au temps de Michel-Ange.

Un des plus grands travaux de Vasari, et qui l’occupa le plus long-temps, fut la refonte qu’il fit de tout l’intérieur du Palazzo Vechio. Cet énorme bâtiment avoit été, de siècle en siècle, modifié, rajusté sans plan, sans ordre, ni méthode, au gré de toutes sortes de besoins et de sujétions. Le grand-duc voulut enfin réordonner tous ces élémens, et il chargea Vasari de lui faire les plans d’une restauration entière de cet intérieur, et d’après ce plan un modèle en bois, qui mît à même de bien apprécier la nouvelle distribution. Le grand-duc approuva le projet et ordonna de mettre la main à l’œuvre.

Il faut lire dans les détails qu’en a donnés Vasari, quel prodigieux travail exigea cette grande restauration. L’intérieur fut entièrement changé pour la construction et la disposition. A la confusion et au désordre de toutes les parties que le hasard y avoit créées, an vît succéder un bel escalier, une série de grandes et belles salles, de cabinets, de chambres, de galeries, avec une chapelle, enfin avec toutes les commodités que les changemens survenus dans les mœurs y avoient rendues nécessaires ; toutes choses dont la description, très-difficile à rendre claire en récit, alongeroit fort inutilement cet article.

Ce qui nous paroît digne d’être observé dans ce grand travail de Vasari, c’est le soin qu’il prit, comme architecte à la fois et comme peintre, d’affecter à chacune des pièces de sa distribution,