Page:Encyclopédie méthodique - Architecture, T3.djvu/536

Cette page n’a pas encore été corrigée
528 TRO TRO


Nous allons voir en effet que les trônes les plus célèbres sont décrits comme élevés sur des soubassemens.

Pausanias toutefois n’en fait pas mention dans la description du trône colossal de l’Apollon Amycléen ; mais on va voir la raison qui dut rendre cette partie étrangère à la construction, ou si l’on veut à l’architecture de ce prodigieux monument.

Ce qui en fait la principale singularité, c’est que ce trône avoit été fait pour une idole qui ne pouvoit pas y être assise. Loin de cela, l’Apollon Amycléen, simulacre des plus antiques et des premiers temps de l’art, consistoit en une sorte de colonne de bronze haute de 30 coudées ou 45 pieds, à laquelle on avoit ajouté une tête, des mains et les extrémités des pieds. La tête étoit casquée ; l’une des mains tenoit un arc, l’autre portoit une lance. Chaque année on revêtissoit cette idole d’une tunique nouvelle. Ce fut plusieurs siècles après, qu’on imagina de construire à cette idole gigantesque, un siège qui dut être proportionné à sa mesure, et ce fut Batyclès de Magnésie qui exécuta ce grand ouvrage de décoration vers la soixantième olympiade, c’est-à-dire soixante ou quatre-vingts ans avant Phidias, qui trouva dans ce monument, le type de son trône du Jupiter Olympien.

Faute de s’être rendu compte de toutes les particularités décrites par Pausanias, et de tous les détails des parties de cet ouvrage, faute encore de les avoir comparés avec toutes les notions de monumens semblables, qui ne laissent aucun doute sur la manière dont ils étoient formés, et sur le genre de leur composition, un célèbre archéologue (M. Heyne) avoit supposé que le trône d’Amyclée étoit de pierre, qu’il étoit construit en manière de niche, ou d’une grande chapelle, ainsi qu’il le dit. Je crois avoir prouvé (dans le Jupiter Olymp. , pag. 202), que ce dut être une simple construction en bois, dont la hauteur ne put pas être moindre, et dut être plus grande que celle de l’idole, c’est-à-dire avoir au moins 50 pieds d’élévation.

Il doit avoir été formé de grandes pièces de bois de charpente, dans les montans de ses pieds, dans ceux du dossier, dans le plateau qui faisoit le siége, dans les traverses du bas et du couronnement. Letrône, c’est-à-dire le plateau du siége, étoit supporté en devant et en arrière par deux figures, sans doute groupées, des Heures et des Grâces, qui dévoient être la continuation des pieds. Sur la traverse supérieure du dossier existoit une file de figures dansantes. Voilà ce qu’il pouvoit y avoir de figures en ronde bosse. Du reste, il faut, d’après la longue énumération de tous les sujets mythologiques, que l’artiste avoit multipliés dans cet ouvrage, regarder tomes les surfaces des montans et des traverses, comme des fonds à compartimens, remplis de bas-reliefs de rapport,


ajustés et appliqués sur l’espèce de marqueterie dont les bois de charpente étoient recouverts. Qui voudroit en deviner davantage sur ce curieux monument, pourra consulter la restitution très-étendue qu’on a essayé d’en faire dans l’ouvrage déjà cité du Jupiter Olympien.

Nous avons dit que le trône d’Amyclée aura pu servir de modèle à Phidias, dans la composition du trône d’Olympie. Il règne en effet, comme on peut le voir (en consultant l’ouvrage précité), la plus grande conformité entr’eux, pour la composition de l’ensemble, l’esprit de la décoration et l’emploi des sujets d’ornemens.

Phidias avoit assis la statue de son Jupiter d’or et d’ivoire dans un trône, auquel, d’après les mesures probables du temple, et les autorités des écrivains, il est difficile de donner moins de quarante pieds de hauteur. Ce trône reposoit sur quatre pieds, mais entre les pieds existoit une colonne qui ne paroît pas avoir fait partie de la composition principale, et qui servit probablement à soulager le poids de la masse, et renforcer le plateau servant de siége au dieu. Il est possible même de conjecturer que ces petites colonnes hors d’œuvre, ne s’élevoient entre les pieds que dans l’espace intérieur, et n’étoient que des accessoires tout-à-fait indépendans. La construction du monument étoit indubitablement composée de montans et de traverses en fort bois de charpente. Des traverses, très-probablement de même largeur que les montans, s’étendoient d’un pied à l’autre du trône, et quelques traverses aussi, dont toutefois la description de Pausanias ne parle point, parce que sans doute elles ne reçurent point d’ornemens, dévoient réunir, surtout par le haut, les longs montans du dossier.

Cette masse reposoit sur un soubassement, autour duquel régnoit, à hauteur d’appui, un petit mur qui empêchait d’approcher de trop près du monument.

Toutes les parties de cette construction, dont on vient de faire l’énumération la plus sommaire, étoient recouvertes de matières les plus précieuses de peintures, de bas-reliefs, d’ornemens de tout genre, qui, comme les compartimens de ce qu’on appelle arabesques, se détachoient sur des fonds de diverses couleurs.

Au sommet de chacun des montans du dossier, d’un côté et de l’autre de la tête de Jupiter, étoient sculptés les groupes en ronde bosse des Heures et des Grâces. Les bras du trône avoient pour support antérieur, des figures représentant le Sphinx thébain, et chacun de ces Sphinx tenoit un jeune Thébain, qu’il étoit censé avoir enlevé.

Un sort grand nombre de Victoires étoit entré dans la composition de ce monument. La description nous dit qu’à chaque pied il y en avoit quatre, et encore deux au bas de chacun. Il est permis de présumer que ces quatre groupes de Victoires occupoient chacun au-dessus de la traverse du