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série des bas-reliefs sculptés dans toute la circonférence, sur une ligne spirale du bas du sût jusqu’à son sommet, et qui y fait tout alentour vingt-trois révolutions.

La colonne a de sept à huit diamètres en hauteur, proportion qui est celle que les Romains donnèrent ordinairement à leur dorique. Quoiqu’une colonne isolée manque nécessairement de beaucoup des caractères qui, dans les édifices, font reconnoître la nature de chaque ordre, cependant, vu les oves dont son échine est décorée, il est assez évident qu’il n’y a pas lieu de se méprendre sur l’intention qu’eut l’architecte, d’en faire une colonne dorique. Du reste ou ne sauroit qu’y admirer la beauté de la proportion et le bel accord de toutes les parties.

Le piédestal n’en est pas la moins remarquable, et par son rapport avec le tout, et par les belles sculptures qui embellissent ses quatre faces, où l’on voit des trophées d’armes de toute espèce, exécutées de bas-relief avec un art admirable. Dans une de ces faces est pratiquée la porte d’entrée, au-dessus de laquelle est l’inscription figurée sur une table que supportent deux victoires ailées. Toute cette composition, aussi remarquable par le bon goût que par son exécution, doit être citée comme modele classique en ce genre.

On doit le dire aussi du genre de sculpture de toute la série de bas-reliefs historiques, où toutes les campagnes de Trajan, ses combats, ses entreprises, ses victoires, sont représentées par ordre depuis le bas jusqu’en haut, en suivant une ligne spirale, dont la courbe très-douce se développe, en raison du très-fort diamètre de la colonne, et de manière à s’écarter le moins possible du plan horizontal que la vue de l’ouvrage semble devoir exiger.

Nous avons déjà fait remarquer à l’article BAS-RELIEF, avec quelle intelligence toute cette sculpture avoit été conduite, et sous le rapport de la composition, et selon les vraies convenances de la nature des sujets, de la forme du corps où ils sont tracés, de l’espace qu’ils occupent, et des facultés visuelles de ceux auxquels ils s’adressent. Nous ne répéterons donc pas ici les raisons que nous avons donnes, pour justifier les prétendus défauts de perspective, que l’on avoit coutume de reprocher à cet ouvrage, espèces de défauts qui le sont, dans un sens absolu, mais qui, relativement considérés, non-seulement sont excusables, en tant qu’ils sont nécessaires, mais sont même un mérite, et contribuent à la perfection de l’ensemble. Voyez BAS-RELIEF.

Il faut, pour se rendre compte du mérite dont nous parlons, se figurer l’effet qu’auroient produit sur le nu de la colonne servant de fond à la sculpture, des bas-reliefs, qui, selon la variété des plans, que la perspective exigeroit, pour être tant soit peu exacte, auroient présenté les saillies les plus


inégales, et les renfoncemens les plus divers. Qui ne voit que ce que le sculpteur peut se permettre fut le fond horizontal d’un mur, fond qu’on ne peut voir qu’en face, et où la multiplicité de plans est sans inconvénient, ne pouvoit avoir lieu sur le fond convexe d’une colonne, qui exige impérieusement, qu’un respecte la ligne perpendiculaire de son galbe ? L’effet des plans reculés ne pourroit s’obtenir que de deux manières, ou en enfonçant inégalement le nu de la colonne, ou en faisant déborder et saillir inégalement les objets, et les figures des plans antérieurs. Mais alors, égal inconvénient, dans tin sens comme dans l’autre, c’est-à-dire que la culmine n’offriroit, de quelque part qu’on la vît, que des lignes cahotées, sous l’effet desquelles disparoîtroit la forme de son fût, ce qui produiroit l’impression la plus désagréable.

Il y a un système, le seul raisonnable, dans l’emploi du bas-relief inhérent aux formes de l’architecture, et il consiste à traiter les sujets et les figures, par une convention particulière, selon l’esprit d’une écriture figurative. Disons donc, qu’ayant à écrire en figures, l’histoire des guerres de Trajan, autour d’une colonne, il convenoit, 1°. de n’y observer aucune perspective ; 2°. de n’y pratiquer que le moins de plans, c’est-à-dire de diminutions d’épaisseur entre les figures, de peur d’effacer trop celles du fond ; 3°. de donner au tout assez de saillie, pour faire lire ces sortes de caractères, et pas assez pour interrompre ou altérer le galbe de la colonne.

Cette légère théorie se trouve confirmée, par les imitations qui furent faites du monument de Trajan. Il est a croire que ceux qui firent la colonne Antonine, prétendirent, comme il n’arrive que trop souvent, améliorer et perfectionner en innovant. Les reliefs de cette colonne ont, comme on le voit, infiniment plus de saillie. Quoique l’on y ait évité le vice de la perspective et de la dégradation des plans, cependant la saillie générale donnée aux figures, a exigé partout, d’en fouilles beaucoup plus les contours, De là il résulte que ce grand effet procuré à la sculpture, va au détriment de la forme et du nu, c’est-à-dire du galbe de la colonne. Il en a été de même de la colonne de Théodose à Constantinople.

Au reste, ces deux derniers monumens ne sauroient soutenir le parallèle avec celui de Trajan, pour le mérite intrinsèque de l’ait. Il y auroit à relever et a faire sentir dans ce reste le plus magnifique de la grandeur romaine, une multitude de beautés, de convenances, et de propriétés de goût, particulièrement pour le caractère propre, et pour l’habileté de l’exécution dans tous les détails, qui seroient la matière d’un ouvrage spécial, et qui, par plus d’une raison, excédant les bornes de cet article, paroîtroient d’autant plus étrangéres à l’objet essentiel de ce Dictionnaire.