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qu’on exécuta, monument qui, depuis, a subi des changemens de plus d’un genre Après deux incendies qui ont consumé son intérieur, sa salle a été rétablie avec assez de luxe et de dépense, et on le désigne aujourd’hui sous le nom d’Odéon. La partie extérieure de ce théâtre, bâti en pierre, qui a survécu aux deux incendies dont on a parlé, n’a éprouvé aucun changement. C’est encore, sous le point de vue de l’architecture et des convenances modernes, le seul théâtre de Paris, que l’on puisse citer comme méritant le titre de monument. Ses abords, la régularité de la place où il est situé, et des rues qui y correspondent, son isolement surtout, ce qui est rare dans une ville aussi serrée que Paris, en recommandent l’aspect, et sous les rapports de commodité du service, ainsi que de facilité de la circulation, aucun autre n’en approche. Entouré de trois côtés par des galeries couvertes ou promenoirs publics, il offre des abris contre les intempéries des saisons, et les embarras que produit l’affluence du monde et des voitures. Son frontispice est décoré d’un portique de huit colonnes doriques, au-dessus desquelles règne une terrasse. De chaque côté a été pratiquée une arcade, qui lie le bâtiment aux maisons voisines, et dont l’objet est de donner une place couverte, à ceux qui descendent de voitures ou qui y remontent. On trouve encore à louer dans ce plan, le vestibule, les grands escaliers qui y aboutissent, et le foyer.

Il est assez surprenant que l’idée ne soit encore venue à aucun architecte, dans la const notion dispendieuse de quelques-uns de ces édisices modernes, de chercher à concilier la sorme extérieure duthéâtre antique, avec les convenances du theâtre moderne. Je veux dire la forme circulaire qui est le véritable type élémentaire du théâtre, en tant que lieu de rassemblement d’hommes pour assister à un spectacle. Cette considération touche particulièrement à une qualité trèsprécieuse en architecture, celle qu’on appelle le caractère Rien de plus désirable en général, pour tous les genres d’édifices, que d’avoir un type constant, qui donnant à chacun d’eux une physionomie distincte, les fasse reconnoître au dehors pour ce qu’ils sont, apprenne au spectateur leur destination, et établisse ainsi entr’eux comme dans les œuvres de la nature, ce charme de variété dont l’œil et le goût éprouvent le besoin. Tel fut, comme on l’a dit ailleurs (voyez CARACTÈRE), l’esprit de l’architecture antique, et tel fut l’avantage de ses principaux monumens, qu’aucun ne peut être confondu avec un autre. L’emploi nécessaire de chacun, ayant dicté la ferme qui lui étoit le plus convenable, l’art s’en empara, la rendit sixe, et lui imprima comme une sorte de signe caractéristique, qui de plus en plus consacré par l’usage, finit par devenir immuable. Dans l’état actuel de nos sociétés, de nos mœurs et de nos arts, il seroit fort difficile de rétablir


cette espèce de langage architectural. Tant de causes ont produit le besoin de diversité, et tant d’autres s’opposeroient à cette simplicité d’idées et d’usages, d’où peut naître le système caractéristique dont un parle, qu’il seroit impossible d’y ramener l’architecture, dans le grand nombre des édifices publies. Aussi voit-on les architectes appliquer à presque tous, les mêmes frontispices, les mêmes ordonnances, les mêmes masses, les mêmes motifs d’ornement et de décoration extérieure ; en sorte qu’il seroit facile de faire servir, sans grande inconvenance, la masse extérieure de beaucoup de monumens, à des destinations extrêmement diverses, C’est surtout à la forme générale qu’il appartient de rendre sensible le caractère dont on parle, et il nous paroît que cette indication extérieure de la destination du théâtre chez les Anciens, s’appliqueroit facilement au théâtre moderne. La partie du monument qui jadis se terminoit en ligne droite, et recevoit, comme on l’a vu, un promenoir en colonnes, seroit encore aujourd’hui la place d’un beau frontispice, et les galeries en portiques couverts de la partie environnante, non-seulement pourrnoient, mais devroient être l’accompagnement obligé de tous les lieux qui, comme les théâtres, rassemblent un grand nombre de personnes.

Ces observations critiques s’adressent, comme l’on voit, moins aux artistes, qu’à l’esprit actuel des arts, et à l’habitude d’employer l’architecture, ses formes et ses ordonnances, comme un luxe d’ornemens arbitraires, et qui peuvent également convenir à tout, Or, dès que l’architecture de chaque édifice ne reposé plus sur les élémens nécessaires d’un besoin quelconque, il est fort naturel que l’architecte use souvent de ses ressources, plutôt à son gré, au prosit de l’honneur qui peut lui en revenir, qu’en vue d’aucune autre raison. Or, on ne nie pas, qu’abstraction faite de cette théorie du caractère propre de chaque édifice, et de celui qui appartiendroit aux théâtres, on n’ait pu produire des ouvrages d’un sort grand mérite, d’une invention très-remarquable, d’une composition sort riche. En tête de ces ouvrages, il faut citer avec beaucoup d’éloges le grand théâtre de Berlin, exécuté dernièrement en pierre à l’extérieur, avec grandeur et magnificence, par M. Schinckel.

Cet édifice l’emporte incontestablement sous le rapport de l’architecture, de la conception de l’ensemble. et de la belle exécution, sur tout ce que l’on peut voir ailleurs. Un très-grand et trèsbean péristyle, composé de huit colonnes d’ordre ionique, orne la saçade antérieure du monument, et s’élève avec beaucoup de majesté au-dessus d’une montée de trente degrés. Les proportions de cette ordonnance, le style du chapiteau, la forme du sronton et les sculptures de son tympan, tout y rappelle ce que l’architecture grecque des meilleurs temps a produit de plus pur et