Page:Encyclopédie méthodique - Architecture, T3.djvu/441

Cette page n’a pas encore été corrigée
TAP TAP 433


aucuns détails capables, tout simulés qu’ils soient, de contrarier la vue, et l’action de marcher, soit par des angles multipliés, soit par des aspérités fictives, C’est l’effet qui recuite dans Certains tapis, comme dans quelques pavemens en marbre, des contrastes trop sensibles de morceaux découpés, et qui tranchent entr’eux par des couleurs trop opposées.

Nous croyons qu’il doit suffire ici, d’avoir indiqué certains principes de goût qui fassent éviter les bizarreries, auxquelles la manie de la variété et de la nouveauté expose, lorsqu’on y applique, sans règle et sans choix, tout ce que l’imagination peut se permettre, dans le champ indéfini de l’ornement.

Il arrive assez souvent que les tapis sont considéres comme de simples objets de luxe, de richesse, ou de convenance, sans aucun égard aux sujets qui y sont représentés. Ainsi l’usage admet de ces riches étosses dans les sanctuaires des églises, en avant des autels. Or, tout le monde sent le ridicule, pour ne rien dire de plus, qu’il y auroit à voir représentés sur ces tapis des symboles profanes, et des ornemens discordans avec le local qu’ils occupent, C’est dire assez que dans le cas où l’on exécute, pour une semblable destination, les tapis qui doivent orner le lieu saint, le dessinateur doit leur approprier, avec un goût sévère d’ornement, des figures et des détails d’objets analogues à ce qui les environne.

Terminons cet article en disant que les tapis servent encore, dans l’ameublement des appartement, à couvrir les tables, les bureaux sur lesquels on écrit, et autour desquels on se rassemble pour la discussion des affaires. De là cette locution ordinaire, mettre une affaire sur le tapis.

TAPIS. (Jardinage.) L’art d’embellir les jardins a emprunté à celui d’orner les intérieurs, le mot tapis. Si en effet, comme on l’a dit, le tapis d’ameublement a souvent dérobé aux ornemens des parterres en verdure, plus d’un motif de dessin ou de composition, une ressemblance de goût et d’effet devoit suggérer l’application de l’idée de tapis à ces grandes surfaces qu’on destine dans les jardins à être plantées en gazon.

Ainsi appelle-t-on tapis de gazon, tapis de verdure, tout grand espace formant pelouse, qui est plein et sans découpure, et qu’on garnit d’une herbe très-fine. On en pratique ainsi dans les cours ou avant-cours des maisons de campagne, dans les bosquets, dans les boulingrins, dans le milieu des avenues et des grandes allées.

TAPISSERIE, s. f. On a déjà indiqué, à l’article précédent, la différence que l’usage met, en français, entre l’emploi du mot tapis, et celui du mot tapisserie, Bien qu’on puisse dire qu’un tapis est de la tapisserie, et que la tapisserie puisse être un tapis, cependant ce dernier mot a reçu deux si-


gnifications particulières. On l’emploie à signifier ces grands ouvrages, qui, de quelque manière qu’ils aient été fabriqués, servent spécialement à l’ornement et à la tenture des murs, et de quelques autres parties encore, mais qui doivent presque toujours être placés verticalement, et non horizontalement, comme les tapis. On emploie encore ce mot à signifier l’art en lui-même, ou les procédés dont on use pour la fabrication de ce genre d’ouvrage.

Ainsi on dit une tapisserie, en parlant de l’œuvre ; on dit la tapisserie en parlant de l’art d’en faire, et de la même manière qu’on dit une peinture, pour un œuvre de l’art de peindre, et la peinture pour l’art qui crée de semblables œuvres.

La tapisserie, considérée comme l’art d’exécuter les tentures, auxquelles on donne le même nom, ne sauroit être du ressort d’un Dictionnaire, où nous ne devons nous occuper de semblables objets, que sous le point de vue de décoration, et des rapports qui en sont entrer les ouvrages dans les bâtimens et les embellissemens de l’architecture.

Nous nous contenterons donc de dire, quant à cet art, qu’il est très-antique, et qu’on en découvre les traces dans les plus anciennes notions historiques. Denx procédés divers ont toujours fait distinguer ses travaux. Celui qui, sans doute, précéda l’autre, puisqu’il est le plus simple, fut le travail à l’aiguille. Une multitude de passages des écrivains de l’antiquité nous font voir ce genre d’ouvrages, comme étant l’occupation des femmes. Il saut en effet regarder comme de véritables tapisseries, ces étosses brodées, dont les poëtes nous ont laissé des descriptions, qui prouvent qu’on y exécutoit toutes sortes de figures, de scènes, de compositions formées de personnages, et jouant ainsi l’apparence de la peinture. Les poëtes, tout en ajoutant le charme de ta fiction aux objets dont ils parent leurs récits, n’en constatent pas moins l’existence et la réalité des usages qu’ils embellissent. Ainsi on peut conclure des sujets brodés par le poëte sur la ehlamyde de Jason, non que ces sujets y étoient, mais que l’usage étoit de broder les vêtemens. On ne croira certainement, ni à la réalité des sujets de composition brodés sur la draperie du lit nuptial de Thétis et Pélée, ni même à l’existence de ces deux époux, mais on sera fort en droit d’inférer de l’épisode poétique de Stace, que l’on faisoit, de son temps, des étoffes tissées et brodées en tapisseries, pour étendre sur les lits.

Il est historiquement certain que tous les ans, un certain nombre de jeunes filles athéniennes, travailloient et ornoient de broderies le peplos, qu’on promenoit dans la fête des Panathénées, avant de le consacrer à la Minerve Poliade. Or, ce peplos, tel qu’il nous est décrit, étoit une véritable tapisserie où l’on représentoit, sans doute à l’aiguille, les exploits de la Déesse. Un distique de Martial