Page:Encyclopédie méthodique - Architecture, T3.djvu/331

Cette page n’a pas encore été corrigée
323
SAL SAL


égyptiennes. On leur donne en longueur et en largeur les mêmes dimensions qu’aux Triclinia (salles à manger) ; mais à cause des colonnes dont on les orne, il faut nécessairement leur donner plus d’étendue. Voici donc en quoi consiste la différence entre ces deux sortes de salles. La salle corinthienne n’a qu’un seul ordre de colonnes, placées, ou sur un socle, ou simplement à terre ; elles sont surmontées d’un architrave et d’une corniche soit en bois, soit revêtus de stuc, d’où part et s’élève une couverture en voûte circulaire. Dans la salle égyptienne, au contraire de l’architrave du premier rang de colonnes, partent des plates-bandes qui vont reposer sur le mur d’enceinte, et reçoivent un assemblage de plancher, et un pavement découvert formant promenoir tout à l’entour. Sur l’architrave, et à-plomb des colonnes dont on a parlé, s’élève un second ordre plus petit d’un quart que l’ordre inférieur, dont la corniche reçoit la couverture el les ornemens. Entre les colonnes d’en haut sont placées les fenêtres ; ce qui fait que cette sorte de salle ressemble à une basilique, plutôt qu’à la salle corinthienne.

Les Grecs, ajoute Vitruve, ont des salles qu’ils appellent cizicènes. On les tourne ordinairement vers le nord, de manière qu’on y ait la vue des jardins, et leur porte s’ouvre dans le milieu. Elles doivent avoir en longueur et en largeur assez d’espace pour qu’on puisse y placer commodément deux tables l’une en regard de l’autre. A droite et à gauche, elles ont des fenêtres en guise de portes, pour que l’on puisse de dessus les lits jouir de l’aspect des jardins. On leur donne en hauteur une fois et demie leur largeur.

On ne sauroit assigner, dans l’architecture moderne, aux salles les plus étendues et les plus remarquables, de formes particulières ni un caractère général, qui puissent devenir l’objet d’une théorie ou d’une description.

Dans les édifices publics il se trouve de très grandes et de fort belles salles destinées à toutes sortes d’usages, mais dont les formes et les proportions ne sont ni fixées par des règles, ni même déterminées par leur emploi. Le mot salle est aujourd’hui celui d’une infinité de pièces, qu’on ne sauroit ni classer dans un ordre méthodique, ni décrire en particulier dans cet article, sans être obligé de répéter ce qui se trouve décrit dans beaucoup d’autres.

Un genre de monumens publics fut toutefois, pendant long-temps, celui qui offrit l’usage le plus constant de très-grandes salles, destinées à des réunions nombreuses et à des banquets publics, je parle des hôtels ou maisons de ville. Dans les temps anciens, et sous le régime municipal de ces temps, la maison de ville, ou comme on l’appelle encore, la maison commune, étoit une sorte de rendez-vous des corps et communautés, et l’usage y avoit établi des festins publics auxquels il falloit destiner une très-grande salle. Cette salle étoit, dans le plan de ces édifices, la partie principale, et l’on voit aujourd’hui, par l’hôtel-de-ville de Paris, qu’elle en occupoit la presque totalité : aussi peut-on encore citer la grande salle de cet édifice, comme une des plus grandes qu’il y ait dans cette ville. On doit en dire autant de l’hôtel-de-ville d’Amsterdam, dont nous avons décrit l’architecture extérieure à l’article de son architecte (voyez Campen). Cet extérieur en est effectivement, pour l’art, ce qu’il y a de plus remarquable, et aucun autre monument de ce genre ne peut, sous ce rapport, lui être comparé. Cependant sa grande salle, qui occupe presque toute la capacité du bâtiment, est, à quelques égards, digne d’être citée, moins par la pureté des formes et son goût de décoration, que pour la grandeur de sa dimension et la richesse de ses ornemens et de ses matériaux. C’est là, en effet, que les Hollandais, qui n’ont ni pierres ni marbres, se sont plus à mettre en œuvre les plus beaux matériaux, dont ils avoient l’usage de lester leurs vaisseaux, usage auquel cette ville doit d’avoir peut-être plus de marbres qu’aucune autre.

Si les hôtels-de-ville, dont nous avons fait mention à leur article (voyez Hôtel), avoient été construits à des époques, où l’art antique avoit remplacé l’art appelé gothique, nous aurions eu, sans doute, à faire mention de salles où les architectes auroient cherché à faire revivre les descriptions que Vitruve nous a données des salles de banquet des Grecs et des Romains.

C’est à ce renouvellement de la bonne architecture, que Paris doit, dans le Palais-de-Justice, la vaste salle à deux nefs collatérales, qu’on appelle la Salle des pas perdus, ouvrage de Jacques Debrosses, et que nous avons décrite à l’article biographique de cet architecte. C’est certainement le plus grand vaisseau, en fait de salle, qui soit à Paris, et peut-être ailleurs.

La grande salle qu’on appeloit de la Seigneurie, au palais vieux, à Florence, est encore un de ces monumens dus aux causes publiques qui ne se sont pins renouvelées depuis. Là où le Gouvernement exige de nombreuses réunions, et repose sur des assemblées de corps, de peuple, ou de sénat, il faut leur construire de vastes salles, Ainsi, au mot Phocicum, nous avons rapporté la description de la belle et grande salle, où se réunissoient tous les députés de ce qu’on pouvoit appeler les Etats-Généraux de la Phocide.

L’aristocratie, gouvernement où le pouvoir est entre les mains d’un fort grand nombre de familles nobles, demande aussi de fort grands lieux de réunion. La salle du palais vieux, à Florence, fut de ce nombre ; Venise en a de semblables, et la grande salle du Sénat, à Gênes, restaurée dans ces derniers temps, offre, pour l’architecture, un des plus beaux et des plus riches ouvrages modernes.

S s 2