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l’étendue, de la nouvelle sacristie de Saint-Pierre à Rome. Jadis une des chapelles de cette vaste basilique servoit de sacristie ; mais, étant devenue beaucoup trop petite, le pape Pie VI a fait construire en dehors de l’église, et attenant à elle, la nouvelle sacristie, qui est un bâtiment considérable, dont malheureusement le goût n’a pas répondu à la dépense qui y fut affectée. Mais si l’architecture au dehors s’est trouvée fort loin de répondre à ce qu’un édifice tel que Saint-Pierre devoit exiger, on ne peut s’empêcher d’y admirer dans l’intérieur la grandeur de la salle principale, l’ordre et la distribution de toutes les parties destinées au service.

Nous citerons, sous un autre rapport, la nouvelle sacristie de l’église de Saint-Denis près Paris. C’est une pièce d’une belle proportion, décorée avec goût, et ornée d’une suite de tableaux représentant l’histoire de saint Louis, ouvrages des meilleurs peintres de ce temps, et qui, exécutés pour le lieu qu’ils décorent, offrent un ensemble de décoration aussi remarquable par son harmonie et sa convenance, que par le mérite de la peinture.

SAGE, adj. Voyez SAGESSE.

SAGESSE, sub. fém. Ce mot exprime une des plus importantes qualités, dans les mœurs et la conduite des hommes entr’eux : on s’en sert aussi pour exprimer, dans les beaux-arts, ce mérite également important, et par lequel leurs ouvrages sont doués de la faculté de satisfaire la raison, l’intelligence et le goût.

La sagesse, dans les actions humaines, est toujours accompagnée de l’ordre. Le principe d’ordre ne sauroit se séparer de la sagesse. Il suffit, pour le prouver, de dire que désordre et folie vont toujours ensemble.

Mais les ouvrages de l’homme ne sont autre chose que la manifestation de l’homme lui-même, qui s’y représente et s’y peint, c’est-à-dire, qui y retrace et y développe, soit ses vertus, soit ses vices, soit ses qualités, soit ses défauts.

Il est donc fort naturel d’appliquer à ses ouvrages les noms des qualités, bonnes ou mauvaises, qui le caractérisent. C’est pourquoi la théorie des beaux-arts a transporté dans son vocabulaire presque tous les noms qui composent celui de la morale. Aussi trouve-t-on, dans l’analyse qu’on fait de la valeur des ouvrages, qu’il y a de la hardiesse ou de la timidité, de la force ou de la foiblesse, de l’orgueil et de l’ambition, de la richesse et de la pauvreté, de la sobriété et de la modération, etc. etc.

Le mot sagesse, appliqué aux ouvrages de l’art, y exprime l’apparence des rapports, des principes et des effets que l’on découvre dans les actions et la conduite de l’homme sage, qui ne fait rien sans un but déterminé, sans s’appuyer


sur des moyens certains, sans, en prévoir les résultats. Or, voilà ce que fait aussi l’artiste auquel on reconnoît de la sagesse. Qu’on examine les œuvres de tous ceux qu’on renomme pour cette qualité dans la peinture ; qu’y remarque-t-on ? un esprit juste, qui n’invente rien d’inutile, rien qui ne tende à expliquer le sujet qu’il représente. De là la clarté de sa composition. On y remarque une imagination vive à la fois et bien réglée, qui a fait prévoir à l’artiste, entre toutes les manières de présenter son sujet, celle qui doit produire le plus d’impression. De là le charme de l’expression.

Le talent qu’on appelle sage, et l’ouvrage qui se recommande par la sagesse, offrent donc un juste tempérament de diverses qualités, savoir, du jugement et du goût, de la raison et de l’imagination, si bien équilibrées entr’elles, qu’aucune ne prédomine sur l’autre.

Qu’on fasse l’épreuve inverse de cette théorie, et qu’on suppose un esprit dont le jugement, non guidé par le goût, soit la qualité exclusive, au lieu de la sagesse, on aura de la froideur. Si l’imagination seule s’empare de toutes les places, et bannit toutes les autres qualités, au lieu de la sagesse, ou aura de l’emportement, de l’irrégulier, de la bizarrerie.

Mais s’il est un art, entre tous, où la sagesse doive être la qualité principale, c’est l’architecture, dont l’ordre est le principe, dont le jugement est le moyen, et dont le but est, avant tout, de satisfaire la raison.

C’est particulièrement chez les Modernes, que cette qualité a dû se faire d’autant plus remarquer, et d’autant plus devenir l’objet des préceptes de la théorie, que l’on a vu prévaloir le principe opposé avec un excès inconnu aux siècles de l’antiquité. Ce n’est pas qu’en comparant entr’eux, les ouvrages et les momumens qui furent autrefois élevés à de si grandes distances de temps et de pays, il n’y ait lieu d’y reconnoître des degrés différens de sagesse. Plus d’une cause ayant introduit dans l’architecture de nouveaux besoins, et par conséquent de nouveaux principes du variété, on peut sans doute classer aussi les ouvrages, en raison de ce qu’ils s’approchent plus ou moins de ce type primitif de l’ordre, père de la sagesse. Cependant on doit dire que s’il s’en trouve qu’on no puisse pas recommander, comme modèles à suivre d’un goût pur et sage. il ne s’en trouve point qu’on puisse noter, comme exemples à fuir d’un goût opposé, c’est-à-dire, déréglé et désordonné.

On peut dire qu’il en fut à peu près de même dans les deux premiers siècles du renouvellement des arts et du goût antique dans l’architecture. Il est assez probable que ce n’étoit guère alors l’usage, ni de recommander, ni de vanter la sagesse dans les compositions de cet art. Des plans ordinairement simples, des moyens de construction naturels et sans recherche scientifique, des élévations régulières dans les masses et l’emploi des