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Rossellino la servit encore dans beaucoup d’autres villes. Par ses ordres, nous dit Gianozzo Manetti, il refit la place de la ville de Fabriano, selon un dessin régulier, et l’environna de boutiques commodes et agréables. Il renouvela plutôt qu’il ne restaura l’église de Saint-François, qui tomboit en ruines. A Gualdo, il remit à neuf et augmenta de nouveaux bâtimens l’église de Saint-Benoit. A Assise, il refit les fondations et la couverture de l’église de Saint-François, et renforça sa construction qui menaçoit d’une ruine prochaine.

Civita-Vecchia fut embellie par lui d’édifices magnifiques, et Civita-Castellana lui dut la construction de ses murailles.

Narni, Orvietto et Spoleta furent fortifiées par ses soins, avec autant d’intelligence que de solidité.

Bernard Rossellino ne fut pas seulement à la tête des architectes de son siècle, il prit aussi rang parmi les premiers sculpteurs de cette époque. Son frère Antonio, livré plus particulièrement à la sculpture, paroît avoir été son maître dans cet art. Il mourut jeune, et Bernard succéda à son talent et à ses entreprises.

Les mausolées, dont nous avons fait connoître le goût et la composition, à l’article MAUSOLÉE (voyez ce mot), étoient alors une source assez féconde d’ouvrages pour la sculpture. Le genre d’idées et de sujets que l’usage avoit accrédité dans les églises, exigeoit assez volontiers, par les travaux d’ornement architectural répandus sur les soubassemens, et beaucoup d’autres accessoires, le concours du sculpteur et de l’architecte ; Bernard Rossellino réunissant les deux talens, se montra, pour son siècle, supérieur dans l’un et dans l’autre. Il porta la finesse du ciseau, la grâce des ornemens et le bon goût des détails de l’architecture, à un point qui a fait mettre un de ses ouvrages, sous le nom du sculpteur le plus célèbre alors en ce genre (Desiderio da Settignano), je parle du tombeau de la bienheureuse Villana, dans l’église de Santa-Maria-Novella. M. Cicoguara a réfuté l’erreur où étoient tombés tous les biographes, en découvrant le marché fait avec Bernard pour ce monument, avec le procureur du couvent de Santa-Maria-Novella, en 1451.

Mais le plus bel ouvrage de Bernard Rossellino est le mausolée du célèbre historien de Florence, Leonardo Bruni d’Arezzo, qu’on voit dans l’église de Sainte-Croix, en face de celui de Michel Ange, chef-d’œuvre de sagesse, de bon goût et de délicatesse d’exécution. Les anges qui, sur le soubassement, supportent et accompagnent la table de l’épitaphe, sont, dit M. Cicognara, d’une sculpture égale, pour l’élégance, à celle de Laurent Ghiberti. Les deux aigles semblent être l’ouvrage d’un ciseau antique. En voyant cet ensemble, que l’on prendroit aussi, quant à la masse, aux détails des profils, au bon goût des ornemens, pour une


émanation de l’antiquité, on peut affirmer que depuis cette époque, l’art n’a rien produit en ce genre de plus parfait.

ROSSI (de) Jean-Antoine, né en 1616, mort en 1695.

Antoine de Rossi naquit près de Bergame, dans une terre appelée Brembato. Il reçut quelques principes d’architecture d’un maître obscur. Sans avoir appris à dessiner, il devint bon architecte. Il le dut à l’examen et à l’étude des beaux monumens de Rome ; aussi fut-il obligé d’avoir souvent recours, pour rendre ses idées, à une main étrangère. Mais l’art de l’architecture consiste beaucoup moins dans l’exécution graphique, souvent fort étrangère au don de la pensée et de l’invention, que dans les combinaisons de l’esprit, auxquelles rien ne supplée.

Un des ouvrages d’Antoine de Rossi, qu’on se plaît davantage à vanter, est à Rome le palais Renuccini, construit dans le Cours. Certainement sa façade, qu’on voit dans la seconde partie du Recueil des palais de Rome, par Ferrerio, présente uue masse, dont la proportion, la disposition et le bel accord rappellent le genre et le caractère des plus beaux ouvrages du seizième siècle. Belle division des étages, justes rapports entre les pleins el les vides, heureuse répétition des fenêtres, bon emploi des chaînes de bossages, tout y est louable ; on n’y peut trouver à redire que les formes lourdes des frontons qui couronnent les chambranles des fenêtres, et quelques détails capricieux qui les déparent. Mais c’étoit la une de ces modes auxquelles se font reconnoître les édifices de ce siècle : du reste, on fait moins de cas de la partie en retour de ce palais, ainsi que de son entrée, qui est sombre, défaut qu’on croit dû à celui de l’emplacement.

Mais il faut citer, comme l’ouvrage le plus remarquable d’Antoine de Rossi, le grand palais Altieri, un des plus magnifiques de Rome, et qui joint la beauté de l’intérieur à celle de l’extérieur. La division de ses étages est des mieux entendue ; l’espacement des fenêtres ne l’est pas moins. Les frontons qui en couronnent les chambranles, sont purs et exempts de tout détail inutile ou bizarre. L’ensemble de toute cette masse est grandiose et du plus bel effet ; l’entablement, sans être des plus purs, a, par sa combinaison avec les consoles qui le supportent, et les petites fenêtres du Mezzanino, intercalées de distance en distance entre les consoles, l’avantage d’offrir à toute la masse un couronnement riche sans lourdeur, et varié sans confusion. On trouve un peu grêles les deux colonnes qui accompagnent la porte d’entrée.

La cour de ce palais forme un grand carré, environné de portiques ou d’arcades, dont les piédroits sont ornés de pilastres. L’architecture en est belle et gracieuse, et par cela même, répond moins bien qu’en ne le desirecoit, au caractère