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qu’on donne encore aujourd’hui à ces trumeaux dans les palais d’Italie, fut favorable à la pratique de l’accouplement. Il ne manque pas de quelques autres raisons pour la justifier. Certainement l’inconvénient qui en résulte à l’égard des colonnes, cesse en grande partie d’en être un, lorsque les ordres ne se trouvent employés que comme décoration de bas-relief ; et voila à quoi se réduit à peu près leur emploi, dans l’application qu’on en fait le plus souvent aux façades des maisons.

Quoi qu’il en soit, celle de ce palais est encore remarquable par un goût de modénature ou de profils fort corrects, par la belle exécution des détails, par la noblesse et la pureté des chambranles, qui servent d’encadrement aux fenêtres.

On admire cependant encore plus, à Florence, le palais Pandolphini, élevé sur les dessins de Raphael, dans la rue San-Gallo. Il n’y a certainement, d’aucun architecte, un dessin de palais plus noble, d’un style plus pur, d’une plus belle ni d’une plus sage ordonnance. Ni Balthazar Peruzzi, ni les San Gallo, ni Palladio, n’ont produit un meilleur ensemble, avec de plus beaux détails et dans de plus justes proportions. Nulle part l’architecture ne présente de fenêtres ornées de plus beaux chambranles, ni d’étages espacés avec une plus judicieuse symétrie. L’entablement de ce palais se trouve cité au rang des modèles vraiment classiques, dans le Recueil des plus beaux détails des monumens de Florence, par Ruggieri.

Si Raphael eût vécu plus long-temps, Rome, sans doute, auroit eu à montrer beaucoup plus de monumens de son génie en architecture, qu’elle n’en possède. Il faut cependant s’étonner qu’au milieu de tant et de si nombreux travaux, il ait encore eu assez de loisir pour écrire son nom sur des ouvrages peu importans, si l’on veut, mais cependant toujours propres à le placer au premier rang des maîtres de l’architecture.

Vasari ne nous apprend pas d’une manière très-claire, si le palais que Raphael occupa dans Borgo nuovo, et qui fut détruit pour faire place aux colonnades de Saint-Pierre, fut de son dessin, ou de celui de Bramante, son parent. Ce fut, dit-il, pour laisser un souvenir de lui, per lasciar memoria di se, que Raphael fit bâtir le palais dont le dessin nous est parvenu. Les paroles de Vasari, dans les deux endroits où il en fait mention, ne semblent indiquer Bramante que comme constructeur de l’édifice, et comme y ayant employé un procédé nouveau, qui consistoit à couler dans des moules les parties saillantes du revêtement extérieur. Bramante, chargé alors des plus vastes constructions, devoit avoir à sa disposition tous les moyens mécaniques de bâtisse, qui ne pouvoient pas encore être à la portée de Raphael. Celui-ci put donc donner le plan, les élévations et tous les détails de son palais, et se reposer sur l’amitié de Bramante, des soins qu’exigea la construction.

Ce qui le persuaderoit encore, c’est que, d’une part, en voyant le dessin de cette architecture, on n’y distingue ni la manière de profiler un peu maigre, ni l’espèce de sécheresse habituelle des compositions de Bramante, et que, de l’autre, on croit retrouver, dans cette jolie façade, les chambranles du palais Pandolfini. Du reste, les armes de Léon X, dont l’écusson surmonte le chambranle de la croisée du milieu, annonceroient que ce palais n’auroit été terminé que sous le pontificat de Léon X, élu pape en 1513, et Bramante mourut en 1514.

L’identité de goût et de manière qui s’étoit établie dans la peinture, entre Raphael et Jules Romain, empêche souvent, comme on le sait, de discerner la part du maître et celle qu’eut l’élève à l’exécution d’un tableau. Il en fut ainsi, et la même cause a produit entr’eux la même incertitude, à l’égard des ouvrages d’architecture. Elle existoit déjà de leur temps. Déjà la critique des contemporains attribuoit indistinctement à l’un et à l’autre, certains monumens, qui de fait doivent passer pour être le produit d’un seul et même génie. Si l’on en croit Vasari, le charmant édifice, appelé d’abord à Rome villa del Papa, puis, et encore aujourd’hui, villa Madama, seroit du dessin de Raphael. C’est aussi l’opinion de Piacenza, qui croit toutefois que Jules Romain y eut part ; ce qui est indubitable quant à l’exécution des ornemens et des peintures.

Il n’y a pus moins de doute sur quelques autres petits palais, chefs-d’œuvre de grâce et de goût, édifices vraiment classiques, qu’on prendroit, dans Rome, pour être de ces habitations d’anciens Romains, que le temps auroit oublié de détruire. Il suffit de les désigner ainsi aux connoisseurs, car ils ont passé par tant de propriétaires, qu’on ne sait plus sous quel nom les faire connoître. Rien, au reste, n’empêche de les attribuer à Jules Romain, et on le peut sans faire de tort à Raphael, puisque l’élève, en ce genre, est encore l’ouvrage du maître, Voy. Pipi Giulio.

Mais un petit bâtiment, qu’on s accorde à regarder comme ayant été une production de Raphael, est celui des écuries d’Augustin Chigi, à la Longara. Ce qui fait l’éloge du goût et du style de cette fabrique, et ce qui probablement auroit jeté de la défaveur sur toute autre, c’est qu’elle fait face et sert de pendant à un des édifices les plus élégans de Balthazar Peruzzi (voy. Ce mot), je veux dire la Farnesine, et que les deux architectures semblent être du même auteur.

On cite ordinairement à Rome, comme l’ouvrage tout à la fois le plus authentique, et dans ce genre le plus considérable de Raphael, un assez grand palais, qu’il nous seroit difficile de

Diction. d’Archit. Tome III.
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